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Comment prévenir la banalisation des maltraitances vécues par les professionnels en EHPAD ? Cécile BOISSIERE partage un retour d’expérience de terrain et propose quelques préconisations.

Article publié  pour ManagerSante.com, par Cécile Boissière, Cadre de Santé au Centre Hospitalier Louis Conte à Gramat.

Cécile Boissière, avec plus de 14 ans d’expérience dans divers services hospitaliers, est cadre de santé issue de la filière infirmière, Elle est également diplômée d’un Master 2 en droit, économie, gestion obtenu à l’IAE de Limoges, avec une spécialisation en management sectoriel.

Reconnue pour ses compétences cliniques et managériales, elle s’engage, au quotidien, autour de l’amélioration continue des soins et l’efficacité des équipes. Passionnée par ses missions, elle est toujours prête à relever de nouveaux défis au service de la qualité.

La violence en milieu de travail est un phénomène préoccupant qui affecte profondément le bien-être des professionnels travaillant en EHPAD. Ces structures, essentielles pour une population vieillissante et souvent vulnérable, sont le théâtre de comportements agressifs et violents, auquel les professionnels doivent faire face quotidiennement. Les actes de violence, qu’ils soient verbaux, physiques ou psychologiques, sont trop souvent banalisés, créant un climat de résignation et de stress permanent.

Mon expérience professionnelle en tant qu’Infirmière Diplômée d’Etat Coordinatrice (IDEC) dans un EHPAD, surtout marquée par la crise de la COVID-19, a mis en lumière la fréquence et la gravité de ces incidents. Des situations poignantes, telles que le cas d’une aide-soignante souffrant de syndrome de stress post-traumatique après une agression à caractère sexuel, ont révélé un manque criant de soutien institutionnel et une tendance inquiétante à minimiser les violences subies quotidiennement.

Durant mes études à l’Institut de Formation des Cadres de Santé, j’ai choisi de traiter cette problématique, dans une étude visant à comprendre les mécanismes de cette banalisation et à proposer des solutions pour y remédier.

L’importance de ce sujet ne peut être sous-estimée, car les professionnels sont au cœur du système de soins pour ces usagers, et leur bien-être est directement lié à la qualité des soins qu’ils prodiguent. La banalisation des violences engendre non seulement une détérioration des conditions de travail, mais elle influence également la perception qu’ils ont de leur propre valeur et de leur profession. La culture de la résignation face à la violence devient un obstacle majeur à la mise en place de pratiques de soins bienveillantes et sécurisées. En effet, comment le professionnel peut-il assurer sa mission de service public, avec la même passion, motivation, dévouement, sens de l’accomplissement qu’on lui demande d’avoir, qu’on lui apprend et qu’on surveille, nous, encadrants, alors que l’un de ses « patients » l’a déjà agressé et que personne n’a entendu sa détresse ?

Pour aborder cette étude, j’ai adopté une méthodologie qualitative, impliquant des entretiens semi-directifs [1]. Cette approche permet de recueillir des témoignages authentiques et de comprendre les perceptions individuelles et collectives de la violence et de sa banalisation. Les résultats de ces entretiens révèlent des points communs inquiétants : la minimisation systématique des incidents, le manque de soutien institutionnel et la culpabilisation des professionnels.

Genèse et assise scientifique

Les EHPAD sont nés de la nécessité d’accueillir une population vieillissante nécessitant des soins constants. Historiquement, les soins aux personnes âgées ont évolué des hospices religieux du Moyen Âge aux établissements modernes spécialisés, reflétant les transformations sociales et médicales. Actuellement, ces transformations se poursuivent, avec des EHPAD qui sont confrontés à un défi grandissant : un déséquilibre entre la demande croissante de places due au vieillissement de la population et des ressources limitées.

Dans un secteur qui connait actuellement une révolution : malaise des soignants, conditions de travail dégradées, modèle de financement discuté, engorgement de l’hôpital, pression croissante, recherche d’efficience[2], il nous faut nous pencher sur de nouvelles pratiques et valeurs, qui doivent être au centre du soin, mais aussi au centre du management. La vulnérabilité des usagers est au cœur des préoccupations soignantes. Compte tenu des observations émergentes que je viens de vous évoquer, il semble légitime de s’enquérir également de la vulnérabilité des professionnels.

L’Observatoire National des Violences en milieu de Santé (ONVS) a publié dans son dernier rapport que les EHPAD/USLD (Unité de Soins de Longue Durée) arrivent en deuxième place des structures les plus déclarantes après la psychiatrie, et passant devant les urgences. Ce même observatoire présente d’ailleurs la lutte contre les atteintes aux personnes et aux biens comme un enjeu pour les établissements de santé, pour l’impact particulièrement important qu’elles représentent sur la « sérénité des conditions de travail et par conséquent la mission de soin »[3].

S’ajoutent à ce diagnostic les représentations sociales de l’EHPAD et des usagers par les professionnels y travaillant. Devenant objet de prédilection des sciences humaines, les représentations sociales s’incluent dans les discours et sont véhiculées par les médias.

Elles en sont par ailleurs très peu étudiées, comme l’ensemble de celles entourant l’institution gériatrique. Il est toutefois relevé qu’elles impactent très largement le manque d’attractivité de ce secteur, liées à l’image de l’hospice, renvoyant à un imaginaire tourné vers l’insalubrité, l’enfermement, l’isolement géographique[4].

En France, les représentations de la vieillesse et de la personne âgée tournent autour de deux notions : les séniors, âgés de par leur âge, symbole du « vieillissement idéalisé », par leur dynamisme et la personne âgée dépendante, traduisant une « déchéance inévitable »[5].

Ces représentations, les conditions de travail difficiles, marquées par le manque de personnel qualifié et de moyens, créent un environnement propice à la survenue de tensions et de violences. Les récents scandales médiatiques et la pandémie de COVID-19 viennent s’ajouter, révéler, accentuer ces observations. Ces conditions mettent en lumière les faiblesses structurelles des EHPAD et la nécessité de repenser leur gestion et leur soutien aux professionnels de santé.

Pour renforcer les éléments contextuels exposés très brièvement, je vais revenir sur quelques notions porteuses de compréhension. Sujet devenu à la fois médiatisé dans le sens des maltraitances envers les résidents, et à la fois restant tabou, peu étudié, des résidents envers les professionnels, il n’en reste pas moins incontournable de par l’impact conséquent qu’il peut avoir.

La maltraitance est définie comme par le Conseil de l’Europe en 1987 « par tout acte ou omission commis par une personne s’il porte atteinte à la vie, à l’intégrité corporelle ou psychique ou à la liberté d’une autre personne, ou compromet gravement le développement de sa personnalité et/ou nuit à sa sécurité financière ».

Cette définition fut ensuite affinée en 1992 par le Conseil de l’Europe, en précisant des typologies des actions de maltraitance : violences physiques, violences psychiques ou morales, violences matérielles et financières, violences médicales ou médicamenteuses, négligences actives et passives, privation ou violation des droits[6].

Les termes de violences et de maltraitance sont alors utilisés comme synonymes, sans distinction clarifiée. Ce « flou » est alors source de nombreuses réinterprétations et un consensus est trouvé pour dire que les maltraitances sont une forme de violence, regroupée en plusieurs termes que sont les mauvais traitements, les abus ou négligences.

Frédéric Mennrath, docteur en sociologie, nous dit : « la plupart des professionnels ont déjà subi des violences de la part des usagers. Elles sont régulières et les risques encourus ne sont pas négligeables ». Quel est alors le ressenti des « professionnels constamment sur leur garde pour se protéger ou pour protéger les autres »[7] ? Il est difficile d’identifier les seuils de tolérance de chacun, car il résulte des différences de représentations et d’appréciations, expliquant, de facto, les disparités des signalements et réponses institutionnelles en regard.

La culture déclarative est alors la seule porte d’entrée qu’un manager emprunte pour agir contre ces maltraitances et les prévenir. Il appartient alors aux encadrants de proximité et directions de faire « l’état des lieux » dans leur établissement : existe-t-il des signalements ? de quel type ? les équipes privilégient-elles la culture de l’oralité dans ces situations taboues et culpabilisantes ? où en est la maturité réflexive des équipes sur ces situations ? Car il est essentiel de rappeler que toute maltraitance ne peut être traitée que lorsqu’elle est identifiée, verbalisée et dénoncée. 

Lors de la réalisation des entretiens d’enquêtes, la plupart du temps, ils étaient bouleversants, choquants. Je ne peux que vous citiez quelques témoignages qui en sont issus, retranscrits stricto sensu :

  • « Il est fréquent qu’on nous insulte ou qu’on nous touche de manière inappropriée, mais personne n’en parle vraiment. C’est devenu normal pour nous. »
  • « La direction nous dit souvent que les résidents ne sont pas responsables de leurs actes à cause de leur état. C’est comme si nos souffrances étaient moins importantes. »
  • « Il y a un manque de soutien institutionnel. Les incidents sont souvent minimisés, ce qui renforce le sentiment de banalisation parmi les soignants. »
  • « Les violences verbales sont presque quotidiennes, mais nous avons appris à vivre avec. Cela fait partie du travail, malheureusement. »
  • « Il y a une culture de l’omerta ici. Les incidents de violence sont rarement signalés car les soignants craignent des représailles ou de ne pas être pris au sérieux. »
  • « Je me souviens d’une collègue qui pleurait après avoir été insultée toute la journée par un résident. On lui a simplement dit de prendre sur elle et de continuer. »
  • « J’ai été témoin d’un incident où un soignant a été frappé par un résident. La réaction de la direction a été de minimiser l’incident et de conseiller au soignant de ‘mieux gérer’ ses interactions avec les résidents. »
  • « Les équipes sont épuisées et démoralisées. Les violences répétées et l’absence de reconnaissance créent un climat de travail toxique. »
  • « Il y a une réelle déconnexion entre les discours officiels sur le bien-être au travail et la réalité du terrain. Les violences sont minimisées, et les soignants ne se sentent pas protégés. »
  • « Il y a eu un incident où un résident a frappé une collègue. La direction a dit que c’était probablement parce qu’elle ne s’était pas assez bien occupée de lui. »
  • « Un jour, j’ai été giflée par un résident. En en parlant, j’ai réalisé que beaucoup de mes collègues avaient vécu des choses similaires mais n’en avaient jamais parlé. »
  • « Les remarques humiliantes de certains résidents finissent par affecter notre confiance en nous. C’est difficile de rester motivé dans ces conditions. »…

Le plus souvent, l’identification d’un risque génère chez tous les individus deux types de comportements : la négation ou la surestimation. S’incluant dans la gestion des risques, le manager appréhende alors la probabilité de survenue d’un évènement dommageable et les conséquences qu’il entrainerait. Une prise en compte de l’ensemble des acteurs de gouvernance des EHPAD doit être réalisée.

Confirmées par l’enquête menée auprès de professionnels, la communication, l’information et la formation en font les réponses à apporter à cet épineux sujet. Au travers de ces résultats, j’ai donc proposé quelques préconisations, pour les cadres de santé, les cadres supérieurs de santé et les directeurs d’établissements, œuvrant en équipe, pour lutter contre la banalisation des maltraitances vécues quotidiennement par les professionnels.

Quelques préconisations utiles :

Pour le cadre de santé

Le cadre de santé est l’acteur premier de tout plan d’action, car il le premier contact de tous : les usagers et leurs proches, les équipes de terrain, les équipes de direction au sens large[8]. S’articulant autour de l’écoute, de la confiance, et des transmissions orales, un cadre de santé est le premier maillon de prévention de la banalisation des maltraitances vécues par les professionnels.

  • Sa présence aux transmissions orales inter-équipes :

La présence active des cadres de santé lors des transmissions orales entre équipes est cruciale. Ces moments permettent de recueillir des informations sur les incidents de violence et de maltraitance en temps réel. Les transmissions orales offrent un espace où les professionnels partagent leurs expériences, posent des questions et reçoivent un soutien immédiat. La présence des cadres assure que ces informations ne sont pas seulement entendues, mais également suivies d’actions concrètes pour soutenir les soignants affectés. De la même façon, le cadre de santé s’imprègnera alors de cette culture de l’oralité, trop souvent priorisée en EHPAD, et pourra alors faire bouger les lignes sur ce sujet, comme l’abaissement de leur seuil de tolérance, qui comme démontré par l’enquête est extrêmement élevé.

  • La co-déclaration des événements indésirables :

Pour encourager les professionnels à signaler les incidents de violence sans craindre des représailles, il est essentiel que les cadres de santé les accompagnent dans le processus de déclaration. Cette pratique montre aux soignants qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils bénéficient du soutien de leur hiérarchie. Cela contribue également à créer une culture de transparence et de soutien, où les incidents sont pris au sérieux et traités de manière appropriée. Elle permet aussi que le déclarant, ayant souvent « peur » d’une réponse institutionnelle sanctionnant à son égard, soit associé au nom de son supérieur hiérarchique direct, de telle façon que jamais il ne ressente de culpabilité à déclarer de tels agissements.

Pour le cadre supérieur de santé

Articulant et coordonnant les actions des cadres opérationnels, un cadre supérieur propose des actions permettant d’étendre une veille et une communication directe avec les équipes. Le rôle du cadre supérieur sera ici d’être le lien entre l’organisation et les Hommes, dans un but de transmission d’informations. Cette thématique étant particulièrement importante, il m’a paru également plus que nécessaire de rayonner plus largement autour du résident : jusqu’à son entourage.

  • L’organisation de débats thématiques :

Grâce au développement d’une culture de convivialité et de communication, socle de la vie en société, force de changements, de sensibilisation, et d’incitations, le cadre supérieur de santé pourra organiser et planifier des débats thématiques réguliers autour des maltraitances vécues par les professionnels. Ces débats doivent inclure non seulement les professionnels, mais aussi les résidents, leurs proches et les familles. Les débats doivent être planifiés avec des objectifs clairs et inclure des intervenants tels que des professionnels de santé, des associations et des psychologues. Les sujets abordés peuvent inclure la gestion de la violence, les droits des soignants et des résidents, et des stratégies de prévention des maltraitances.

Une méthode efficace pour ces débats est celle du World Café, initiée par Juanita Brown et David Isaacs en 1995. Cette méthode consiste à diviser les participants en petits groupes autour de tables, chaque groupe discutant d’un sujet spécifique pendant un temps déterminé. Les groupes changent ensuite de table et de sujet, favorisant ainsi l’échange d’idées et l’intelligence collective. Cette approche encourage la participation active de tous les participants, stimulant la créativité et l’empathie, et aidant à générer des solutions innovantes aux problèmes complexes et sensibles, tel que celui abordé dans cet article[9].

Pour le directeur d’EHPAD public

Le directeur joue un rôle crucial dans la gestion globale de l’établissement. En tant que représentant légal, il est responsable de la mise en place de politiques et de procédures garantissant la qualité des soins et la sécurité des résidents ainsi que des professionnels. Il veille également à l’animation de la démarche qualité, à la gestion des risques et à l’impulsion d’une culture institutionnelle respectueuse et sécuritaire. Sa capacité à observer, analyser, entreprendre et agir, tout en adoptant un style de gestion inclusif et participatif, est essentielle pour accompagner le changement et améliorer les conditions de travail au sein de l’EHPAD.

Il en va d’ailleurs du rayonnement de l’image de marque de la structure, dans sa gouvernance, aujourd’hui évaluée, rendue publique et permettant le benshmarking des établissements répondant aux mêmes critères. Dans la lignée des préconisations exposées précédemment, son rôle est d’accompagner l’ensemble des acteurs dans ces changements.

  • L’accompagnement au changement :

Le directeur joue un rôle stratégique en tant qu’agent du changement. Il promeut une culture institutionnelle de respect et de sécurité pour les professionnels. Cela inclut la mise en place de politiques de sensibilisation et de communication, ainsi que des mécanismes de soutien pour tous les acteurs. Le directeur est visible et accessible, et montre par l’exemple l’importance de traiter les incidents de violence avec sérieux et compassion. Dans cette thématique, il devient un « acteur de projet ». Crozier et Friedberg disaient « Nul n’est hostile au changement pour peu qu’il y trouve un intérêt »[10]. C’est là qu’interagissent les compétences du directeur, sa prise de distance face aux évènements, sa connaissance institutionnelle, sa position dans les relations sociales et la transmission d’informations. Cet ensemble lui donne la compétence unique de prévoir et d’entreprendre, rendant possible l’accompagnement aux changements. Patrick Lefèvre[11], consultant, nous dit qu’il est nécessaire de réunir plusieurs conditions pour rendre possible le changement : la prise de conscience du besoin de changement, la reconnaissance des résistances existantes, l’affrontement des incertitudes, la planification des étapes qui mèneront aux évolutions, une guidance suffisante pour l’atteinte de cet objectif et l’implication de chacun dans ce processus.

  • Le travail en équipe et la politique institutionnelle :

Le directeur encourage la cohésion d’équipe en impliquant tous les acteurs dans la réflexion et la mise en œuvre des solutions. Il peut organiser des sessions de team building, des réunions régulières et des ateliers de résolution de problèmes pour renforcer les liens entre les membres de l’équipe. L’exemplarité, la disponibilité, l’écoute, le soutien entrent dans ses valeurs morales autant que dans celles de l’équipe dans laquelle il évolue. De lui rayonnent les comportements et représentations des acteurs de direction. La « culture » du savoir-être est le socle de son travail social dans un but de changement social positif, qu’il peut alors transmettre par le biais de documents stratégiques tels que le projet d’établissement.

Ce projet, clarifiant le positionnement institutionnel de la structure, est constitué entre autres, du règlement de fonctionnement et du contrat de séjour.  Ce dernier doit donc inclure des actions concrètes et des orientations stratégiques, mettant l’accent sur la QVCT et la sécurité des soignants. Il apparait alors comme essentiel d’y intégrer un avenant, présentant les risques encourus pour le résident s’il devait être maltraitant envers les professionnels. Le document doit clairement stipuler les comportements attendus des résidents et les conséquences de tout acte de violence envers les membres de l’équipe, y compris la possibilité de résiliation du contrat de séjour en cas de comportement inacceptable, procédure encadrée par le Code de l’Action Sociale et des Familles[12].

La formalisation de cette nouvelle entente par cet avenant nécessite alors une importante communication autour de cette thématique, rejoignant les précédentes idées dans les rôles du cadre de santé, sur le plan opérationnel, et du cadre supérieur, dans un rôle de gestion et de coordination de la mise en place de cet avenant.

  • Communiquer sur les mesures conservatoires :

Dans cette même dynamique de communication ouverte sur la prévention des maltraitances envers les professionnels, le directeur pourra présenter les mesures conservatoires. Elles sont encadrées par le Code du travail et le droit statutaire des fonctionnaires et agents publics, et visent à protéger la santé et la sécurité des résidents et des membres du personnel. Le directeur doit être transparent sur les procédures à suivre et les actions à entreprendre en cas d’incident, et s’assure que tous les membres du personnel sont informés de ces mesures et de leurs droits. Ces mesures conservatoires désignent toute mesure d’urgence prise pour la sauvegarde d’un droit ou d’une chose, visant à limiter le risque de voir la situation se dégrader. Il est important de rappeler qu’elles ne sont pas une sanction, ne relèvent pas de mesures disciplinaires, mais ont pour but de préserver autant la personne d’accusations non encore avérées, que de l’empêcher de sévir à nouveau.

En conclusion :

Il est crucial de rappeler que l’ensemble de ces propositions n’est pas une liste exhaustive au vu de l’ampleur de la tâche à effectuer, de la durée dans laquelle s’inscrivent ces avancées, nécessitant alors des réajustements permanents. Lors de la réalisation de l’enquête ayant permis ce travail de recherche, nombreuses étaient les idées soumises par les professionnels interrogés : formations, facilités administratives dans la déclaration des évènements, etc., qui méritent d’être envisagées comme s’ajoutant à toute réflexion sur cette problématique.

Je pense qu’il est grand temps de se saisir de ce sujet complexe : la banalisation des violences subies par les professionnels en EHPAD, de la part des usagers, et j’étends le débat également vers leurs entourages et familles.

Vous travaillez en EHPAD ? Vous êtes cadre de santé ? Cadre supérieur ? Directeur d’établissement ? La question ne se pose plus : chaque jour, les professionnels sont violentés, sans même parfois ne pas en être conscients. Pour autant, chacun de vous, dans vos rôles respectifs, œuvrez dans un but commun : garantir la qualité des soins et la sécurité tant des résidents que des professionnels.

Comme je l’ai rédigé dans la conclusion de mon travail de recherche, cet article et cette étude ne se veulent pas révolutionnaires, accusateurs ou moralisateurs. Ils se veulent un « petit travail » pour mettre à jour un des plus grands maux des professionnels travaillant quotidiennement pour le respect et la dignité des personnes âgées institutionnalisées. Ils se veulent une bien modeste réflexion sur ce qu’il serait possible d’apporter dans la poursuite de la qualité de vie au travail. Ils se veulent une proposition d’action que j’aurais souhaité retrouver dans mon exercice professionnel, en tant qu’aide-soignante, infirmière, infirmière coordinatrice, et maintenant cadre de santé.

Comment pourrions-nous avoir plus d’impact ? En étant plus nombreux à réfléchir à des actions correctives promouvant la prévention.

Ne serait-ce pas le moyen d’ouverture vers une reconnaissance des professionnels du secteur gériatrique ? Ces actions pourraient-elles s’inclure sur le long terme à l’attractivité de cette spécialité ? L’unité dans cette réflexion ne pourrait-elle pas être un moyen de communication dans d’ultra-transparence recherchée par les usagers et leurs proches en EHPAD ?

« Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde », Mahatma Gandhi

Pour aller plus loin :

[1] Martine Hlady Rispal. (2002). La méthode des cas. De Boeck Supérieur

[2] Catherine Deroche. (2022). L’essentiel du rapport d’information, « Hôpital : Sortir des urgences » (No 587 ; p. 8)

[3] https://sante.gouv.fr/professionnels/ameliorer-les-conditions-d-exercice/observatoire-national-des-violences-en-sante/dgos-onvs

[4] Vercauteren, R., & Connangle, S. (2021). EHPAD, des espoirs ? Complexités managériales d’un milieu en mutation. Érès éditions.

[5] Debré, E. (2019). L’exercice du cadre de santé en Ehpad. Soins Cadres, 28(115), 59‑60. 

[6] Sokolowski, L. (2013). 4.6. Prendre soin de la maltraitance. In Prendre soin (p. 279‑289). Hermann

[7] Mennrath, F. (2019). Violences en institution, bientraitance en situation. Presses universitaires de Grenoble.

[8] Chantal de Singly. (2009). Rapport de la mission Cadres Hospitaliers (p. 125). 

[9] Arnaud, B., & Caruso Cahn, S. (2019). Outil 47. Le world café. In La boîte à outils de l’intelligence collective (p. 134‑137). Dunod. https://www.cairn.info/la-boite-a-outils-de-l-intelligence-collective–9782100802111-p-134.htm

[10] Crozier, M., & Friedberg, E. (2014). L’acteur et le système : Les contraintes de l’action collective. Éd. du Seuil.

[11] Lefèvre, P., & Scandellari, T. (2016). Guide du directeur en action sociale et médico-sociale (4e éd). Dunod.

[12] Légifrance. (2020, octobre 1). Article L311-4-1—Code de l’action sociale et des familles—Légifrance

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