N°2, Août 2019
Article rédigé par plusieurs experts, auteurs en 2019 d’un ouvrage collectif intitulé « La révolution du pilotage des données de santé » publié chez LEH Edition, avec David GRUSON , Elodie CHAPEL, Delphine JAAFAR, Pierre LOULERGUE, Judith MEHL, Florent PARMENTIER, et Anaïs PERSON
La France dispose sans aucun doute de la plus grande base de données de santé au monde.
Ces données de santé bénéficient d’une protection juridique spécifique en droit français. C’est notre patrimoine commun. Son exploitation s’inscrit dans un cadre sécurisé mais trop méconnu. Cette méconnaissance retarde l’exploitation d’une base de données qui permettrait pourtant de faire des avancées considérables dans les domaines de la recherche médicale, de l’évaluation des risques et de l’organisation des parcours de santé.
L’exploitation des données de santé suscite autant d’espoirs que de craintes, relevant souvent du fantasme.
Les grandes masses de données – le big data – et l’intelligence artificielle sont deux outils majeurs qui permettront de réduire l’incertitude et d’enrichir le système de santé par une connaissance toujours plus grande de ses variables.
Les sciences de la santé sont des objets de connaissance difficiles. Elles le sont structurellement, de par la révolution scientifique permanente qu’elles connaissent depuis le XIXème siècle. Mais elles se caractérisent également par un doute permanent exprimé par les citoyens.
Les dernières décennies ont rendu très concrets à une échelle mondiale les risques liés au fonctionnement du système de santé et au progrès technologique notamment au moment des grandes crises sanitaires. La régulation des sciences de la santé et la protection contre ses risques ont été érigés comme une mission cardinale de l’Etat avec la naissance de notre système de sécurité sanitaire. Avec les évolutions technologiques, le rapport au temps et à l’information s’accélère. Toute incertitude affichée par des autorités publiques, même confrontées aux limites de la science, ne serait plus socialement et politiquement acceptable.
Or, pour prévenir les risques, il faut les identifier, pour les identifier, il faut disposer de données de bonne qualité. Pour réguler et piloter un système de soins ou un système de sécurité sanitaire de manière pertinente, il faut connaître les populations, leurs attentes, leurs besoins, le bassin de vie, l’environnement auquel elles sont exposées. D’où le caractère crucial de disposer de données alimentant la connaissance des grandes variables de santé.
Au-delà de l’action du régulateur, la connaissance est également un enjeu déterminant d’accès aux soins et à l’innovation. Connaître les patients, leur caractéristiques biologiques et génétiques et leurs pathologies répond ici à la fois à un enjeu de protection contre les risques – ne pas exposer des patients avec des facteurs de risque que l’on ignore – et d’accès à l’innovation – ne pas passer à côté de ceux pour qui un traitement innovant serait une vraie chance supplémentaire.
Améliorer la veille épidémiologique, construire des politiques de prévention plus performantes, éclairer la prise de décision du régulateur, accélérer et rendre plus sûre la recherche clinique sont autant de progrès révolutionnaires que notre pays pourra accomplir en s’appuyant sur le big data en santé.
Plus encore, les données de santé ont des conséquences géopolitiques profondes, étant un vecteur de pouvoir, d’influence et de commerce pour des acteurs cherchant à faire prévaloir des modèles économiques, sociaux et politiques. De ce point de vue, il convient pour les Européens de faire émerger une vision responsable de l’IA, éthique, respectant leurs propres valeurs (notamment pour la protection des données personnelles), à travers la mise en place d’une régulation positive de l’IA. Si cela ne devait pas être le cas, les Européens seraient réduits à importer des solutions techniques en provenance des Etats-Unis ou de la Chine, qui ne tiendraient pas compte de leurs préférences.
C’est ainsi que l’on peut dire que les enjeux de la souveraineté en matière de santé numérique et de respect des préférences sociales des Européens sont indissociables. La révolution du pilotage des données de santé peut aussi être une révolution géopolitique, permettant à un nombre étroit de pays de maîtriser cet enjeu essentiel de souveraineté.
L’intelligence artificielle a un très fort potentiel de changement des pratiques médicales. Parce qu’elle arrive vite, de manière massive et a déjà considérablement modifié nos vies quotidiennes et nos comportements.
Les changements se feront autant au niveau des acteurs de soins, des managers que des patients eux-mêmes.
Une bascule positive s’est opérée au cours des derniers mois pour accélérer la bascule de notre système de santé vers ce data management. Le Health Data Hub vient d’annoncer les résultats de son premier appel à projets : cette nouvelle plateforme nationale a vocation à permettre de surmonter la partition constatée en France entre base de données médico-administratives et données cliniques (qui restent positionnées chez les professionnels libéraux ou dans les entrepôts des établissements de santé). La nomination de Dominique PON et Laura LETOURNEAU comme pilotes de la transformation numérique donne l’espoir d’un cap politique.
L’avis émis par le Comité consultatif national d’éthique représente un véritable changement de paradigme : le problème éthique principal clairement identifié est désormais l’insuffisance du recours au numérique et à l’IA dans notre système de santé. D’où la nécessité d’une « régulation positive » de l’IA et de la robotisation en santé : c’est le sens des propositions portées par Ethik-IA pour faire émerger des référentiels souples permettant de réguler opérationnellement les enjeux éthiques associés à cette transition vers le pilotage par les données.
En tant que soignant, il faut déjà intégrer ces innovations dans les pratiques et ce n’est que le début. Ces évolutions profondes concernent l’ensemble des champs du management en santé et l’ouvrage s’efforce de faire le point sur les enjeux RH, financiers, techniques et transversaux associés à cette révolution. Des développements précis sont, en particulier, consacrés aux différentes pistes susceptibles d’être actionnés pour valoriser ce pilotage par les données de santé. Certains leviers sont d’ores et déjà disponibles et d’autres restent à construire.
Dès lors, il est essentiel, et même vital, d’envisager toute implémentation liée à l’intelligence artificielle de manière éthique. Cela veut dire qu’il faut construire ce cadre rapidement et de manière adaptable pour garder toute l’agilité dont le monde du soin sait faire preuve.
La France doit avoir une place prépondérante dans le monde de la santé de demain, comme elle l’a aujourd’hui. Et elle a tous les atouts pour garder une place de leader dans ce domaine.
Nous remercions vivement David GRUSON , Elodie CHAPEL, Delphine JAAFAR, Pierre LOULERGUE, Judith MEHL, Florent PARMENTIER, et Anaïs PERSON pour avoir accepté de partager leur expertise, à travers cet article, pour nos fidèles lecteurs de www.managersante.com
2019
OUVRAGE COLLECTIF PUBLIE PAR LES AUTEURS
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