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VIOLENCES HOSPITALIERES : vers un état des lieux (chapitre 2) !!!

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 N°3, MARS 2016


Nous avons vu dans le premier chapitre les violences exercées par les soignants et les usagers entre eux. Parmi ces violences qui rentrent dans le champ des risques psychosociaux, il semble opportun d’aborder les violences diffusées par les salariés entre eux, que ce soit de manière ascendante ou descendante. Le harcèlement sera abordé ultérieurement. Les services de soins sont des reflets de ce que nous sommes. Les événements qui s’y passent ont valeur d’exemple tant nous reproduisons au travail ce que nous sommes à l’extérieur…Portée par un stress lié à l’angoisse du contexte professionnel, la violence est une réalité quotidienne et bien présente dans les couloirs aux rapides pas étouffés.

LA VIOLENCE VERBALE

La violence verbale est difficile à quantifier. On note très peu de traces de remontée, il existe le plus souvent une régulation interne au sein de l’unité. Elle se manifeste sous forme d’insultes, de propos grossiers, méprisants, dévalorisants, des menaces pouvant aller jusqu’à des diffamations, des entorses à des règles ou même des consignes de sécurité.

LA VIOLENCE PHYSIQUE 

Les manifestations de violence et d’agressivité sont des formes extériorisées de comportements incontrôlés de passage à l’acte. La victime est alors atteinte dans son intégrité corporelle.

Lorsque l’information de tels phénomènes  émerge, la situation est alors urgente à régler car elle est le reflet d’une tension majeure en service. Cette tension qui couvait depuis longtemps est arrivée à son paroxysme. Dans cette circonstance, la prise en charge est immédiate par l’écoute, l’aide à verbaliser les conflits dans un climat sécuritaire de neutralité bienveillante permettant de désamorcer des tensions tant individuelles qu’au sein du collectif. Ces manifestations aiguës de souffrance concernent le plus souvent le personnel de soins mais peuvent toucher toutes les catégories professionnelles de l’hôpital. L’alerte vient plus souvent de l’équipe que de la personne elle-même.

La violence physique se manifeste sous forme de bousculades, de jets d’objets, de griffures, de morsures, de menaces avec objets (aiguilles, bistouri, flacon de solutés,…) Les violences physiques peuvent prendre une connotation à caractère sexuel auxquelles s’ajoutent des propos non-équivoques. L’image du corps prend une autre dimension. Le personnel, majoritairement féminin peut témoigner de regards déplacés, d’attouchements inappropriés, de retenue ou séquestration dans une réserve à matériel ou chambre de garde….

LA VIOLENCE MORALE ET/OU PSYCHOLOGIQUE

La violence psychologique entre personnel s’est toujours exprimée dans le milieu hospitalier lors des rites initiatiques (bizutage) plus ou moins durs des nouveaux arrivants, mais elle prend actuellement des formes plus inquiétantes liées à la dureté des relations dans des milieux de plus en plus contraignants, et à l’apparition de phénomènes de mobbing (persécution au travail). Les relations sociales dans les équipes représentent une part importante de la charge psychique à gérer par les soignants.

Il n’a que deux alternatives : se mouler sur le même mode de fonctionnement que le groupe, quel que soit sa structure de personnalité, et accepter la loi imposée en reniant ses propres valeurs, ou partir du service. Muter rapidement l’agent en difficulté évite l’enkystement des problèmes, car l’apparition d’une décompensation anxio-dépressive peut-être extrêmement rapide. Il importe d’être vigilant et de repérer ces phénomènes itératifs d’exclusion du groupe, car ils traduisent une souffrance majeure d’un collectif qui va laminer tout nouvel arrivant sur le même mode, quel que soit sa personnalité.

La violence insoutenable à gérer, peut, à l’extrême, conduire le soignant au suicide.

En période de crise, quand se forment des clans organisés où toute communication est rompue, les participants au conflit peuvent choisir une personne isolée comme bouc émissaire. Il s’agit le plus souvent d’un agent qui ne partage pas les lois du collectif de travail, qui présente une fragilité ou une hypersensibilité particulière, qui exprime sa peur dans des situations où le groupe défensif s’interdit de ressentir la moindre émotion pour se protéger. Cette stigmatisation d’une victime au sein du groupe pourra aboutir à son exclusion. Plus l’organisation du travail est rigide et porteuse de souffrances, plus le risque est grand de voir apparaître ces phénomènes. Les conséquences peuvent être dramatiques, car pendant très longtemps la victime mise en échec se tait. La hiérarchie doit être particulièrement vigilante vis à vis des personnes marginalisées dans l’équipe, et rester à l’écoute pour arriver à désamorcer le phénomène destructeur.

La dureté des relations de travail dans des milieux de plus en plus contraignants est à l’origine d’une violence de plus en plus manifeste entre personnel : intolérance vis à vis de l’absentéisme des agents même lorsque celui-ci est justifié, refus d’aide vis à vis des agents qui présentent une limitation d’aptitude pour raisons de santé ou grossesse, mauvais accueil réservé aux personnels reprenant leur activité à mi-temps thérapeutique après un long arrêt, manque de patience vis à vis des remplaçants temporaires, hostilité vis à vis des personnels faisant une formation professionnelle. La charge de travail pèse alors trop lourdement sur le personnel restant qui ne peut plus « tenir » dans la durée.

La non- reconnaissance par ses pairs, l’encadrement et les médecins des unités du travail effectué par les soignants est une source de démotivation, de perte d’intérêt, et d’incohérences. Elle est dévalorisante et destructrice pour les soignants qui perdent ou ne trouvent plus le sens de leur travail et réagissent souvent violemment à la négation de leur engagement.

Comme nous venons de le voir, les situations de violence à l’hôpital sont très diverses, les facteurs de causalité sont multiples et intriqués : impact des violences de la société actuelle et exigence accrue des contraintes de travail à l’hôpital. Ces phénomènes, devenus une réalité fréquente au quotidien, génèrent un coût humain indirect important tant sur le plan individuel que sur le fonctionnement collectif : absences au travail, congés de longue durée, détérioration du climat relationnel et de la qualité des soins impactant la sécurité de l’usager…

Pourtant, il existe une dissonance entre le ressenti pénible des agents et l’absence de chiffres quantifiant le problème (déclaration d’accidents de travail). Les phénomènes de violence sont souvent banalisés, cachés, avec un sentiment de honte, de culpabilité, de solitude des agents victimes d’agression.

Par contre, les causes de la violence psychologique sont complexes à analyser et à faire émerger. D’autres exemples de décompensation individuelle polluent le soignant  face aux contraintes de la réalité de son travail, qui entrent en résonance avec des événements personnels difficiles à surmonter. Ce débordement psychologique temporaire nécessite une écoute attentive pour organiser un changement de poste adéquat. Quant à la violence collective qui règne dans les équipes en burn out, elle fait l’objet d’un non-dit et d’un silence impuissant, qui empêche toute possibilité de transformation et jette un voile brumeux sur cette situation pathogène qui pourra perdurer des années.

 

Dans un contexte de tension sur les effectifs et d’évolution de nouvelles organisations, les difficultés pour les soignants de fournir un travail de qualité vont à l’encontre de leurs valeurs éthiques et peuvent les conduire à un non-sens dans le travail et une perte d’estime de soi.  La négation de leur engagement, l’absence de reconnaissance des efforts réalisés, sont très coûteux sur le plan de la santé et peuvent amener de véritables décompensations psychiques. Dans la littérature, on sait que les atteintes à la santé les plus graves sont corrélées à la question suivante : Avez-vous les moyens de pouvoir effectuer un travail de qualité ?

Chrystel ARTUS

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Nous remercions vivement Chrystel ARTUS pour partager son expérience professionnelle en proposant sa Rubrique mensuelle, pour nos fidèles lecteurs du Blog MMS

Chrystel ARTUS

Infirmière de formation, je suis modératrice dans le domaine des risques psychosociaux. J'anime des formations en lien avec la santé et la prévention. Je suis aussi consultante.

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Une réponse

  1. Et que dire des N+1 qui persecute et harcele leurs agents ! En toute impunité voir avec l’abrobation muette des N+2 ! Je suis en cours de construction d’un article car trop c’est trop de la part de ces managers pervers narcissiques.

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