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Comment la médiation peut-elle intervenir dans les conflits entre médecins à l’hôpital ? Le Professeur Yann MIKAELOFF en présente les indications, les limites et les alternatives possibles (Partie 2)

N°2,  Février 2023

Nouvel article publié pour ManagerSante.com par le Professeur Yann MIKAELOFF, Neuropédiatre à la Faculté de médecine Paris-Saclay. Il est également expert judiciaire près la Cour d’Appel de Paris (Compagnie CEMCAP)/ Médiateur santé, éducation (DU IFOMENE ICP)/

Il est responsable du Centre de Protection de l’Enfant et de l’Adolescent (CPEA) Val-de-Marne/Hauts-deSeine, DMU SEA, Hôpital Bicêtre, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et Consultant des CMS de Cachan et Villejuif/ Equipe « Psychiatrie du développement », CESP INSERM Paris-Saclay

Relire la première partie de cet article.

Introduction

Le monde professionnel de la santé, y compris l’hôpital public, est un lieu où les intérêts parfois contradictoires des différentes catégories de personnels, comme des usagers peuvent créer nombre de facteurs de risques de souffrance au travail. Il s’agit d’un terreau fertile pour la violence et les conflits, s’aggravant mutuellement. Selon l’enquête récente du Collectif Santé en Danger sur un millier de professionnels de santé, 98% des professionnels de santé ont été victimes de violences internes ou externes dans le cadre de leur exercice professionnel au cours des 24 derniers mois. 66% des professionnels de santé ont été victimes d’injures et d’insultes dans le cadre de leur travail.

Ces violences représenteraient 22,5% des causes de démissions ou des abandons du métier, facteur majeur de la crise actuel du système de santé hospitalier. Les professionnels de santé ne sont pas ou peu formés à faire face à ces violences de façon efficiente et résiliente. Il est évoqué par l’enquête que peu de professionnels réagissent en faisant appel à leur hiérarchie, aux dispositifs d’alerte ou en portant plainte.

Concernant les conflits au travail en général, une étude (Focus RH mai 2021) indique que 85% des salariés sont y confrontés régulièrement. Une autre étude d’octobre 2021 (Opinion Way) précise qu’un mois de travail par an est perdu en conflits au travail. Traduit en coût salarial, le temps passé à composer avec les situations de conflit équivaut à plusieurs milliards d’euros chaque année. Nous consacrons en moyenne 1/3 de notre temps à lever des obstacles dans les décisions à prendre. Les facteurs de risques de souffrance au travail y sont souvent nichés.

La parole se libérant, le harcèlement moral ou sexuel au travail font l’objet de plaintes de plus en plus nombreuses. D’après une enquête de 2015, une femme sur cinq a été confrontée à du harcèlement sexuel au travail. Quant au harcèlement moral, il est mentionné dans la moitié des affaires de prud’hommes. Le secteur public, comme le secteur privé, est concerné. Selon l’enquête récente Qualisocial (21/11/22, voir article site internet Souffrance et Travail de Marie Pezé et linked-in), près d’1 agent sur 3 de la fonction publique hospitalière (27%) dit avoir été victime de situations de harcèlement au travail. Même en l’absence de statistiques spécifiques par catégories professionnelles pour l’hôpital public, ces causes de souffrance majeures au travail les impactent probablement aussi à un niveau significatif, personnellement et collectivement, affectant la santé des personnes, leur vie personnelle, comme l’efficacité et la responsabilité des organisations.

Les contentieux sur les sujets d’inégalités ou de discriminations sont en croissance également. Selon le baromètre 2016 du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail un actif sur trois dit avoir été discriminé au travail ou dans sa recherche d’emploi au cours des cinq dernières années.

Ces situations doivent être abordées avec sérieux par des évaluations et des actes de protection, comme de prévention. Elles ont des conséquences pénales et l’employeur a le devoir de protéger ses salariés. Un grand nombre d’organisations, comme des hôpitaux par exemple, mettent en place des processus internes et/ou externes pour alerter et intervenir dans ces situations. L’intervention d’un tiers médiateur avec une approche soigneusement impartiale de sa part peuvent parfois permettre de trouver les solutions adaptées, en toute conscience des écueils possibles.

Harcèlement moral au travail, quels signes d’alertes ?

Le harcèlement moral au travail est confirmé de façon juridique selon les termes des articles L. 133-2 du Code général de la fonction publique, L. 1152-1 du Code du travail et 222-33-2 du Code pénal. Il est constitué par des agissements répétés envers la victime, qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail, ayant porté atteinte à ses droits et à sa dignité, altérant sa santé physique ou mentale ou compromettant son avenir professionnel. Les actes persistants et se répétant, le harcèlement moral peut être caractérisé, indépendamment de l’intention caractérisée de son auteur, quand il est démontré que ce comportement nuit à la victime. Les attitudes prohibées ont souvent trait aux conditions de travail.

L’impact, direct ou indirect, sur le salarié s’explique par l’un de ces cas : méconnaissance de ses droits essentiels, atteinte à sa dignité, altération sa santé physique et/ou mentale, incidences sur sa carrière et son avenir professionnel.

La jurisprudence y associe les actes contre la victime : attitudes et comportements visant à mettre en quarantaine la victime (type ostracisme), semer la zizanie autour d’elle, violation de sa dignité, offenses, insultes, défaillances et dysfonctionnements managériaux en sa défaveur, incompétence, inconscience, volonté de nuire, etc. En effet, un encadrement inadéquat est susceptible de constituer un harcèlement si l’une des conditions de l’article précité est matérialisée par des faits : dès lors que ces faits « se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail» (Cass. Soc, 10 novembre 2009, 07-45.321).

L’auteur est défini comme toute personne dans l’entreprise ou l’organisation (Cass. Crim. 6 déc. 2011, no 10-82.266), qui fait subir ces agissements répétés, attentatoires à la santé et la dignité du salarié, et commet une infraction pénale (art. 222-33-2 Code pénal). Du point de vue de la prévention et de la gestion de ces situations dégradantes, il incombe à l’employeur une obligation générale de sécurité et de protection de la santé du salarié (art. L4121-1 et L. 1152-4 du Code du travail). L’employeur doit faire la démonstration qu’il a pris toutes les mesures de prévention et, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer une mesure de harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser (Cass. Soc. 1er juin 2016, n° 14-19.702).

Les non-réponses répétées aux questions et aux emails au travail peuvent faire partie de systèmes dysfonctionnels, maltraitants et manquant à l’obligation de sécurité. Elle diffère clairement d’un aspect bienveillant qui pourrait être de différer la réponse pour faire grandir le questionnant.

Quand la médiation peut elle aider à trouver des solutions constructives et durables pour ces situations ? Quels risques d’instrumentalisation ?  

En cas de conflits au travail, il est important de saisir les instances locales de prévention et d’en parler avec ceux qui peuvent aider : des collègues, la médecine du travail, le/la psychologue du travail, la Commission Médical d’Etablissement (CME) à l’hôpital public, les délégués du personnels, les représentants des Ressources Humaines (RH). Les instances centrales des organisations peuvent être un recours en cas de non-réponse ou de réponse inappropriée à l’alerte souffrance au travail. Pour les personnels hospitalo-universitaires, les ressources facultaires doivent aussi être incluses. Le nouveau référentiel 2023 de la Haute Autorité de Santé (HAS) pour la certification des établissements de santé intègre que la gouvernance met en place des mesures de gestion des difficultés interpersonnelles, interprofessionnelles et des conflits, dont la médiation respectant la confidentialité (critère 3.5-02).

En cas de signalement de situation de violence au travail auprès de la hiérarchie, il doit y avoir enquête de l’employeur, impartiale et confidentielle. Le code du travail prévoit (article L1152-6) qu’une procédure de médiation peut être engagée. Le médiateur peut accompagner l’organisation et les personnes concernées, afin que chacun puisse être entendu, avec humanité et équité. Le DRH fait souvent la proposition de médiation aux personnes concernées. Il sollicite un médiateur interne ou externe, le second souvent en recours en cas d’échec de la médiation interne (voir par exemple le processus d’Air France, dans son bilan 2021, avec une évaluation quantitative coût-bénéfice de l’évitement des contentieux). La tendance internationale est qu’un dispositif de protection de la personnalité externe est de plus en plus préféré à un dispositif interne (particulièrement pour des raisons d’indépendance du médiateur).

Le médiateur des conflits au travail, tiers neutre, indépendant et impartial, avec une expérience des milieux hospitaliers, accompagne en toute confidentialité, dans le respect de la place de chacun, de l’autorité des responsables comme du besoin d’autonomie et de reconnaissance des salariés. La parole de chacun peut être exprimée et entendue, et chacun peut être reconnu à égalité dans son humanité. C’est alors seulement que la créativité de chacun peut être sollicitée pour trouver les bonnes solutions, celles qui conviennent à tous et qui seront effectivement appliquées.

Les conditions de la médiation peuvent ne pas être réunies s’il y a une pathologie psychiatrique d’une partie, des conditions psychologiques à risque d’aggravation du fait de l’exposition à l’agresseur (comme un syndrome anxio-dépressif non équilibré ou un syndrome de stress post-traumatique réactif, secondaires au harcèlement) ou des menaces de violences physiques ou verbales. D’où l’importance de l’entretien préliminaire (souvent d’au moins 2 heures) pour évaluer et analyser la situation et le point de vue de chaque partie. Les parties peuvent décider de quitter la médiation à tout moment du processus. Le médiateur peut décider d’arrêter le processus si la situation est telle qu’il est impossible de continuer sans danger, selon la déontologie de son métier. Le médiateur peut s’en expliquer en aparté avec chacun de même qu’en plénière avec tous. Le médiateur envoie un compte-rendu de fin de mission au DRH, respectant l’engagement de confidentialité des parties.

Il s’agit de sortir des impasses et d’élaborer en concertation des solutions concrètes, de prévenir les ruptures de dialogue et la violence, de restaurer au quotidien la qualité de vie au travail. Le processus de médiation doit être garant de l’équilibre impartial entre les parties à tout moment de son déroulement. La communication et les propositions sur les étapes du processus doivent émaner du ou des médiateurs (en cas de co-médiation). La médiation doit veiller à prendre en compte les points de vue de chaque partie et à les reformuler si besoin avec justesse et équité, y compris sur le déroulement du processus de médiation. La médiation doit être vigilante à ne pas favoriser de rapport de force en faveur d’une partie qui pourrait profiter du temps de la médiation, par exemple pour renforcer une action contentieuse ultérieure par un recueil inapproprié d’informations ou retarder une solution à la dégradation de la situation de la victime.

La situation au travail de la partie victime ne doit pas s’aggraver au cours de la médiation, notamment par des représailles inappropriées par sa hiérarchie affectant ses conditions de travail ou son organisation. La santé physique ou psychique de la victime de harcèlement ne doit pas continuer à se dégrader au cours de la médiation. Le (les) médiateurs n’ont pas d’obligation de résultat, mais une obligation de moyens. Un recours en responsabilité pourrait être envisagé si besoin auprès du Conseil National de la Médiation qui se met en place actuellement.

La protection de la confidentialité en cas de harcèlement moral au travail pose des défis particuliers. Lors de la rédaction du rapport de médiation, les questions relatives au principe de confidentialité sont à considérer avec une grande attention par le ou (les) médiateur(s). Lorsque le présumé harcelé refuse de recourir à la médiation et que les mis en cause souhaitent produire le rapport en justice, l’une des parties ayant refusé la médiation, il n’y a pas eu de médiation. Donc le principe de confidentialité ne s’applique pas et le médiateur peut, dans son rapport, indiquer que la médiation n’a pu être organisée. Lorsque les deux parties ont accepté la médiation, et que l’une d’elles produit le rapport en justice, le médiateur ne saurait être garant du respect de la confidentialité par les parties, même s’il prend le soin de rappeler dans son rapport que celui-ci est strictement confidentiel. Il doit donc être attentif à la rédaction de ce rapport, de façon à rester factuel, à utiliser le conditionnel, et à ne pas se présenter comme témoin de faits dont il n’a connaissance que par les propos des parties. A noter que, en Suisse par exemple, pour pallier ces inconvénients notamment, le médiateur ne rédige pas de rapport sinon pour dire que la médiation eu lieu ou non, qu’elle ait abouti ou non.

Lorsque la recherche d’accord échoue ou que l’accord est rompu par une partie, le médiateur informe les parties des éventuelles sanctions encourues selon les qualifications du conflit affectant la victime et des garanties procédurales prévues en faveur de la victime. Le médiateur ne doit pas soumettre aux parties ses propres propositions de solutions, c’est-à-dire des idées qu’il aurait eues lui-même ou dont il serait le messager. Le médiateur recueille les multiples solutions proposées par chacune des parties et les aide éventuellement à les clarifier en les reformulant sans les influencer. Dans le cas où les parties trouvent une solution, l’affaire est réglée. Le rapport du médiateur pourra se limiter au constat que les parties ont trouvé une issue. Il pourra éventuellement en faire une description avec leur accord.

Quels avantages de la médiation et quelles alternatives pour des solutions durables en cas d’échec ? Quelle place des valeurs de la médiation ?

Le conflit peut être source de richesse, un levier de création de valeurs et de changement constructif, une source d’innovation et d’adaptation, selon des conditions et un cadre accompagnant et bienveillant.

La médiation aide à travailler sur les facteurs de risques de voir le conflit mener à de la souffrance au travail, à en contrôler l’escalade, l’effet de cristallisation du conflit, à favoriser la communication pour faire entrer l’autre dans son espace personnel. Nous passons 80% de notre temps à négocier sans forcément nous en rendre compte, s’agissant de tensions du quotidien.  Nous prenons en moyenne 20 % de décisions seuls.

Nous avons 4 alternatives de comportement dans des situations de tensions : « flight » = fuir (éviter, se désengager), « freeze » : rester paralysé (soumission à la norme au détriment de l’engagement, de la motivation et changement), « fight » : attaque (surenchère, escalade), « flow » : c’est là toute la dynamique de la médiation, avec dialogue, communication, recherche de solutions ensemble, négociation.

La médiation n’est pas une conciliation ni un arbitrage. Elle est un mode amiable de résolution de conflit, une alternative à la justice, où les personnes/parties concernées sont maîtresses ensemble de leur avenir. C’est un processus structuré, avec un cadre précis et des règles. Il existe donc des médiateurs à un niveau institutionnel (médiateur de la consommation, du crédit, des banques, assurances, défenseur des droits, médiateur des entreprises pour les conflits inter-entreprises…). La médiation touche tous les domaines de la vie (famille, voisinage, administrations, santé, scolaire…). Elle peut être judiciaire ou conventionnelle. Le but est que 2 ou plusieurs parties en conflit se rencontrent et travaillent, lors d’entretiens confidentiels avec le médiateur, à parvenir à un accord mutuellement satisfaisant pour régler leur différend. La médiation repose sur l’autonomie et la responsabilité des participants, avec la liberté d’aller au bout ou de quitter la médiation à tout moment si cela ne convient plus.

Les avantages de la médiation sont donc :

  • Résoudre les blocages, les retards, la démotivation, l’absentéisme, la mauvaise publicité pour l’entreprise ou l’organisation générés par les conflits,
  • Diminuer les tensions au quotidien car l’on peut mettre des mots sur les émotions,
  • Mettre en avant le droit à la parole et la nécessité de l’écoute, la liberté de décision des parties elles-mêmes : pouvoir se poser et exprimer ce qui ne va pas,
  • Vivre la médiation même sans accord à tout de même des bienfaits grâce au cadre qui amène à s’interroger et à communiquer avec respect,
  • La médiation apporte des plus-values certaines pour l’organisation : temps, coût, liberté de décision, confidentialité, relation, prévention.

Les alternatives en cas d’échec peuvent être : l’arbitrage, la conciliation, le procès voire le renoncement. La médiation judiciaire peut être envisagée au tribunal administratif, comme au civil ou au pénal dans certaines situations. 

Les valeurs de la médiation et son humanisme rejoignent celles du soin et de la prévention !

Elle favorise l’émergence de la vérité et les actions en faveur la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT). La qualité de vie au travail (QVT), se référant à au bien-être au travail, concerne les actions qui permettent de concilier amélioration des conditions de travail et performance de l’organisation. La QVT devenue QVCT – par l’effet de la Loi 2 août 2021- couvre plusieurs thématiques : l’égalité professionnelle homme-femme, la lutte contre les discriminations, le compromis entre la vie personnelle et vie professionnelle. La réforme « Santé et Travail » du 2 août 2021, en transposant l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 9 décembre 2020, entend renforcer les instruments de prévention de la santé au travail. La médiation en fait partie. 

La médiation favorise le respect entre les parties, le mépris étant l’autre face de la médaille qui attise le conflit. L’ignorance de l’autre et le mépris sont des signes de dégradation relationnelle, attentatoire à la personne et à la synergie humaine pour l’efficience de l’organisation. Le mépris peut se traduire par le silence, l’évitement, l’hypocrisie et le mensonge. L’arrogance est un débordement dysfonctionnel visant à réduire l’autre au silence, outil du rapport de force, inacceptable en organisation même en situation de supériorité hiérarchique. Artisan et facilitateur de la qualité de la relation humaine, le médiateur agit en prévention ou résolution du confit consécutif au mépris, via le dialogue contributif. Il identifie les causes de la mainmise, voire de l’emprise toxique. Il confronte les parties aux vécus et ressentis. Il réinstalle la confiance et l’échange. La manifestation de l’ignorance du facteur humain, le mépris, cède le pas à l’empathie par la reconnaissance et l’altruisme relationnel réparateur.

La médiation favorise la loyauté au service du public : le devoir de loyauté des agents de l’hôpital public concerne toutes les positions hiérarchiques, incluant également une loyauté des uns envers les autres, y compris des managers vers les managés. L’employeur doit mettre à disposition du salarié les moyens nécessaires à la réalisation de sa mission, y compris la formation et la sécurité au travail. Déclinaison de la bonne foi, l’obligation de loyauté d’ordre public s’impose aussi au salarié. La loyauté est la préservation des intérêts des parties, des usagers et du système, dans le contexte des valeurs du service public de la République française. Le médiateur peut aider chacun à retrouver les valeurs collectives, positivement synergiques, en partant de son inclination pour le métier de soignant.

La médiation a un rôle restaurateur de la confiance et de la synergie constructive dans l’organisation, alors que le conflit se nourrit de la défiance, de la suspicion, de la désapprobation, de l’hostilité et d’une compétition interpersonnelle toxique rompant l’alignement relationnel vertueux offert par l’organisation. La prudence est légitime et favorable à la résolution du conflit, alors que la défiance accroît les ressentis de danger, malmène le discernement et l’esprit critique et laisse libre cours à l’escalade agressive. La loyauté dans l’intention et l’action, la transparence de la communication, l’assertivité et l’humilité, qui sont favorisées par la médiation, vont peser positivement vers l’apaisement et la restauration de la confiance entre les parties, voire de la bienveillance mutuelle dans une collaboration constructive au service du collectif et des patients.

Dans le monde de l’hôpital public en crise qui cherche à se reconstruire en s’adaptant aux défis, un management bienveillant se traduit par la préservation altruiste des énergies et synergies humaines, par l’anticipation basée sur la consultation élargie et la délibération collective, les espaces de discussion, la libération de la parole, la conformité aux critères de qualité de vie et de bonnes conditions de travail et la prise de conscience effective en termes de responsabilité environnementale. En cela, l’apport du médiateur est de restaurer la confiance, de décoder la colère, d’élucider l’attente, de déterminer les besoins et les valeurs, d’accompagner les médiés vers les lumières de la rationalité pour aider les personnes à évoluer dans des rapports interpersonnels constructifs pour soi et pour l’organisation. Face à l’imprévu et l’incompréhensible, la clarté et l’écoute désamorcent l’escalade du conflit, favorisées par la médiation.

En conclusion :

Les avantages essentiels de la médiation dans les conflits professionnels à l’hôpital public impliquant des médecins sont de donner la parole, d’(e) (r)établir le dialogue entre les personnes concernées, de leur permettre d’agir elles-mêmes sur leur avenir et de leur rendre leur dignité. Ce que les autres démarches offrent moins ou pas. Dans les situations de harcèlement, dont la qualification finale est juridique au-delà de l’alerte et de la mise en place d’une protection en son attente, les limites de la médiation doivent être considérées en cas d’instrumentalisation par une partie pouvant renforcer son rapport de force en défaveur de la victime, par exemple. Les alternatives comme l’arbitrage, la conciliation ou le procès doivent alors envisagées par les victimes avec leurs conseils, alors que le(s) médiateur(s) impliqué(s) doivent aussi marquer l’arrêt de la médiation pour contradiction avec ses principes, comme évoqué au démarrage du processus. La médiation « curative » vraiment indépendante, impartiale et neutre est à consolider dans les conflits concernant les médecins dans les hôpitaux publics, l’idéal étant d’aussi déployer en parallèle la médiation de projet qui peut contribuer à prévenir des conflits toxiques.

Merci à Luc Heimendinger, médiateur et enseignant à l’IFOMENE (Institut Catholique de Paris), pour ses avis éclairants sur cet article et pour ses enseignements sur la posture du médiateur et sur la médiation de projet (www.avatar-conseil.ch).

Merci à Maître Agnès Tavel, avocate et médiateur professionnel, pour son commentaire détaillé sur la confidentialité en médiation, disponible sur son site Internet.

Merci à Maître Kebir, avocat du travail et médiateur, pour ses commentaires inspirants et stimulants sur Linked-In, pleins d’humanisme.

Pour aller plus loin :

Revoir les [REPLAY] du 1er Colloque National Annuel de ManagerSante.com® au Solidarités et de la Santé avec de nombreux experts intervenants.

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