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Le coaching à distance peut-il être une bonne solution ? Denis BISMUTH nous partage les avantages et les limites.

Nouvel Article rédigé pour ManagerSante.com par Denis BISMUTH, Chargé du pilotage de l’innovation pédagogique de l’entreprise Isokan, superviseur certifié de l’EMCC Global Supervision Individual Award (ESIA, European Mentoring and Coaching Council) et animateur de la commission recherche. Il est Dirigeant du cabinet de coaching Métavision.

Il est auteur de plusieurs livres et co-auteur d’un ouvrage collectif de référence publié en Octobre 2021 chez LEH Edition, sous la direction de Jean-Luc STANISLAS, intitulé « Innovations & management des structures de santé en France : accompagner la transformation de l’offre de soins« .

Denis BISMUTH est intervenu à l’occasion du 1er Colloque de ManagerSante.com le s Lundi 28 Mars 2022, au Ministère des Solidarités et de la Santé (inscription gratuite pour suivre l’évènement en ligne) sur la table ronde portant sur « Quelles priorités dans la transformation des organisations en santé ? ».

N°14, Juillet 2022

Ces dernières années ou la pandémie a favorisé l’usage des moyens de communication à distance, on a vu se développer des pratiques de coaching en visio-conférence.

Quels sont les avantages et les inconvénients de telles pratiques ?
Dans quel contexte et pour quel type de problème une telle pratique a-t-elle sa raison d’être ?

Pour répondre à ces questions nous avons choisi de questionner une experte en ce domaine.
Clara Leparquier dirigeante de la société « MTH service » propose diverses ressources d’accompagnement en face à face ou à distance. Il y a deux ans elle a développé une plateforme de coaching a distance MTH hot line qui met des coaches et des superviseurs à disposition des encadrants,
Cette rencontre nous a permis d’identifier quelques-uns des ingrédients d’une bonne pratique d’accompagnement à distance et de proposer une réflexion sur la manière de faire des choix judicieux dans l’ingénierie de l’accompagnement des collaborateurs.

Les points fort du coaching à distance

1) Une alternative au coaching traditionnel

Cette modalité a été développée pour répondre à une réelle demande client :
Les managers accompagnés par un coaching traditionnels exprimaient des besoins ponctuels et spécifiques qui appelaient une certaine réactivité et un accompagnement orienté solution. Ainsi ce type d’intervention peut permettre de répondre à un besoin d’ajustement spécifique et urgent. Ce type d’action n’est pas destiné à remplacer le coaching mais il vient plutôt en complément. Cela permet une approche plus pragmatique et plus opérationnelle de l’accompagnement. Comme en témoigne un client interviewé : « J’ai du mal à me positionner vis-à-vis de mes anciens collègues, dont je suis devenu le manager et Je ressens une forte pression et charge de travail, j’ai besoin de prendre du recul et trouver des pistes de solutions ».
Mais cette modalité reste toujours identifiée à du coaching dans la mesure ou le processus mis en œuvre reste le même : prise de recul du client par rapport à sa problématique, élaboration d’une réflexions théorique sur le cas apporté par le client et travail sur l’élaboration de sa propre solution.

2) Une autre temporalité

Si le coaching en face à face permet de se situer dans une temporalité moyen terme, le coaching digital permet de répondre avec une certaine réactivité à des demandes d’ajustement plus « court terme » parce qu’il ne suppose pas une trop grande intendance : On peut toujours dans un délai de 48 h trouver 45 minutes et un coach disponible sur la plateforme pour dénouer une problématique.
De plus cette orientation solution permet au coach d’une manière contractuelle de sortir de sa mission de coach pour aller ponctuellement sur le terrain du conseil en faisant des propositions d’action ou sur le terrain de la formation en faisant des apports de contenu ou des mises en situation ponctuelles.

3) Une plus grande réactivité

La modalité coaching a distance permet de répondre rapidement à un besoin spécifique. Contrairement au coaching dans sa forme traditionnelle qui est orienté « développement de la personne » ce type de plateformes développent en complément des approches qui permettent de répondre à des demandes spécifiques. On peut avoir à répondre à une demande spécifique d’un manager qui par ailleurs est accompagné sur le long terme avec une modalité de coaching traditionnel. Ce type de coaching est aussi l’occasion d’intégrer ce qui a pu être appris en formation, et qui reste parfois encore trop théorique.
Cette modalité permet d’aller plus vite à l’essentiel. Mais cela n’a pas que des avantages : Chaque médaille a son revers et si parfois il est important d’aller rapidement à l’essentiel, le temps ne respecte pas ce que l’on fait sans lui. En ce sens la réussite de ce type d’accompagnement suppose une réflexion approfondie pour l’ingénierie du coaching afin de déterminer la meilleure stratégie.

4) Une souplesse en termes de gestion de temps et d’espace

On ne peut pas imaginer réaliser en présentiel des sessions de 45 Minutes ne serait-ce que pour le coach ou le client qui aurait beaucoup plus de temps de déplacement que d’intervention.

Le numérique offre une souplesse de communication que ne permet pas les rencontres en direct ou il faut gérer les disponibilités des coaches et du coaché en même temps que la recherche d’un lieu répondant aux critères de confidentialité du coaching.

Le numérique nous permet de nous abstraire des contraintes du temps et de l’espace : J’ai eu l’occasion d’animer depuis Paris une réunion de cadrage tripartite ou le coaché était à Dallas son N+1 en Chine.

Ainsi on peut voir des coaches suivre leurs clients sans avoir à se soucier de la géographie de la relation. La plateforme permet de ne plus dépendre de l’aspect géographique mais elle permet d’adresser le client au bon coach en fonction de sa spécialité.
De plus cela permet de placer les moments de coaching dans les interstices des moments de travail intense.

5) Une relation plus facile

On sait par expérience que le coaching par téléphone a une certaine limite dans la mesure où on ne voit pas la personne et que le coach perd une partie des informations non verbales qui l’aident à conduire sa séance.

En même temps on peut noter que, pour certains clients, une séance de supervision ou de coaching au téléphone peut représenter un avantage : cela peut lui permettre de se sentir en sécurité dans un environnement familier dans la mesure où il peut choisir le lieu où il se trouve pour la séance.

En même temps, le fait de ne pas voir le coach, peut lui permettre d’être plus centré sur lui-même et donc plus concentré. Le fait d’être seul au téléphone chez lui ou dans un endroit où son intimité est protégée peut le rassurer et permet un travail d’introspection plus profond.

On aura donc une introspection d’une meilleure qualité dans la mesure où le client n’est pas dérangé dans la relation avec son coach par un contexte d’entreprise dans lequel il se doit de rester dans son personnage de manager.

Les limites du coaching à distance

Les limites de cette pratique sont déterminées par le fait que la distance modifie le type de relation qui s’installe entre le coach et son client.

Dans une relation de face à face l’attention du client est soutenue par la présence physique du coach.

On peut imaginer qu’en visioconférence le client devant son ordinateur reçoit des notifications sur son téléphone ou des nouveaux mails et aura du mal à se concentrer. Pour assurer une bonne qualité de séance, il est important de rappeler certaines règles à respecter : mode avion pour les téléphones, fermeture des applications mails, des pop-up, etc.

On peut aussi voir dans la visioconférence un risque d’enfermer le client dans son environnement professionnel. Ce qui empêche la mise à distance nécessaire que permet l’utilisation d’un espace de rencontre extérieur.

De la même manière il peut y avoir des clients qui n’arrivent pas à communiquer s’ils ne voient pas leur interlocuteur. Il peut arriver qu’en visioconférence le client soit déstabilisé par le fait de se voir en icone sur son écran, alors qu’en présentiel ou au téléphone il ne se voit pas.

En résumé, il n’y a pas de bonne réponse, mais il faut trouver la réponse adaptée. On peut alors s’autoriser à essayer et à changer  de mode de relation en fonction de ce qui advient.

On peut imaginer qu’une action de coaching puisse se dérouler en format hybride : une séance en présentielle suivi d’une séance en distanciel.

On ne fait pas les mêmes choses dans un cas ou dans l’autre :
En présentiel on va travailler la posture et des mises en situation
Alors qu’en distanciel on va plutôt être orienté solution. La distance permet d’être plus centré sur les situations et moins centré sur la personne et son développement comme en situation de coaching individuel.

En ce sens, diversifier les modalités d’intervention permet de répondre au plus près aux besoins du coaché.
Que ce soit le présentiel, la visioconférence ou le téléphone chacune des modalités a sa place en fonction du client et de sa problématique.

En conclusion :

D’une manière générale on peut dire que les interventions à distance du type visioconférence, même si elles ne répondent pas tout à fait au même besoin que les démarches de coaching traditionnels, ne sont pas un « mode dégradé » du coaching traditionnel. La digitalisation permet une démocratisation du coaching, qui selon Clara Leparquier, ne doit pas se faire à n’importe quel prix.

Tout est une question de qualité de la prescription. Le responsable de l’organisation du coaching doit être en mesure de définir si le contrat et le contexte de l’accompagnement permettent de choisir si le coaching devra se faire en face à face ou non à distance.

En ce sens une des questions à se poser dans le choix d’une démarche de coaching à distance, comme pour le choix d’un coach en général, c’est la question du professionnalisme, de l’expertise de l’ingénierie de la prescription : : le DRH ou le responsable des achats des prestations est-il formé ou compétent pour conduire ces processus de prescriptions ?

 

Surtout quand un nombre non-négligeable d’intervenants sont dans la chaine de prescription, comme on peut le voir dans les grands groupes. Il n’est pas rare dans les grandes institutions d’avoir une chaine de 5 à 7 d’interlocuteurs entre le coach et le client final.

Par ailleurs, il y a un risque non-négligeable que certains acteurs du coaching profitent des opportunités qu’offrent la technologie pour mettre en œuvre une sorte d’ubérisation/ industrialisation du coaching avec tous les risques qu’on peut imaginer : des coaches sous-payés et mal formés, des conditions de travail ne permettant pas une professionnalisation en continue des coaches par de la supervision. Ce qui pourrait entrainer une dégradation de la qualité et de l’image du coaching.

Pour le client, qui dans la mise en place de l’action n’a pas forcément accès directement au coach qui va être proposé, il est nécessaire d’avoir des garanties quant au professionnalisme de l’organisme support :

Valider en amont l’équipe de coachs,
Demander quels types de contrats ils ont avec l’organisme,
Se renseigner sur la politique de sécurité et confidentialité de l’entreprise.

On peut définir un certain nombre de règles qui permettent d’offrir un minimum de garanti au client et de limiter le risque d’erreur de casting. Pour cela il est nécessaire d’avoir au minimum :

– Un interlocuteur de plateforme qui est formé à l’ingénierie du coaching,
– Une équipe de coaches certifiés, supervisés, exerçant le métier depuis plusieurs années,
– Un encadrement expérimenté dans la gestion des modalités d’accompagnement
– Une politique de sécurité et de confidentialité, un code de déontologie, signés de tous les coachs,
– Des contrats de prestations de services entre l’organisme et ses partenaires coachs.

Pour aller plus loin :

  • Britton J, Effective virtual conversations ed: potential realized média
  • Leparquier C., Mézières F. « S’épanouir Professionnellement – Donner du Sens à sa Carrière ». éditions Ellipses 2021
  • SF Coach Du bon ou du mauvais usage de la distance ; coaching au temps de la covid la théorisation du coaching à distance dans les sciences humaines Storylab edition
  • Sweeney D., Harris L.S., Student centered coaching from distance. Ed corwin England

Nous remercions vivement Denis BISMUTH, Chargé du pilotage de l’innovation pédagogique de l’entreprise Isokan, superviseur certifié de l’EMCC Global Supervision Individual Award (ESIA), animateur de la commission recherche de l’European Mentoring and Coaching Council (fédération de coach), Dirigeant du cabinet de coaching Métavision) et auteur de plusieurs ouvrages, pour partager régulièrement son expertise professionnelle pour nos fidèles lecteurs de ManagerSante.com

Biographie de l'auteur : 

Chargé du pilotage de l’innovation pédagogique de l’entreprise Isokan, il accompagne les entreprises dans la mise en place de l’organisation apprenante. il anime des supervisions de coach  et de dirigeant.
Denis BISMUTH est membre et  Animateur de la commission recherche de l’European Mentoring and Coaching Council  EMCC France (fédération de coach). Il est superviseur certifié de l’EMCC Global Supervision Individual Award (ESIA).
Dirigeant du cabinet de coaching Métavision depuis 2000, il accompagne des grands groupes industriels comme des PME et des entreprises du secteur social qui font le choix de faire évoluer leurs pratiques managériales dans  le sens d’une responsabilisation des acteurs. Il a développé une modalité de professionnalisation par la supervision :
les groupes de coprofessionnalisation© qui lui permettent de superviser le management intermédiaire, les coaches et les dirigeants.
Spécialisé dans l’Audit d’entreprise et de centres  de formation innovants il les accompagne dans leur transformation vers une organisation apprenante.
Il est également auteur de nombreux articles publiés dans l’excellente revue HBS (Harvard Business Review)
Colloque de ManagerSante.com 28 & 29 Mars 2022 (PRE-PROGRAMME) 
Denis BISMUTH

Directeur de l’innovation pédagogique chez Isokan Formation

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2 réponses

  1. Merci de votre retour positif
    Effectivement comme toutes les méthodes il a ses limites. L’essentiel est pour le prescripteur de connaître ses limites

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