N°2, Février 2016
L’ORIGINE DES RPS JURIQUEMENT SOUVENT DECONSIDERES, POURQUOI ?
Le droit n’est pas réellement mis en œuvre sans litige. Seuls les principes généraux de prévention peuvent être utilement invoqués auprès d’un employeur qui ne mesurerait pas assez les risques alors même qu’il doit pouvoir évaluer ces risques chaque année.
Parmi les facteurs de RPS insuffisamment pris à la hauteur de la gravité des faits, lorsqu’ils ne sont pas complètement niés par l’employeur, voire par les représentants du personnel, nous pouvons citer, au ban du droit :
- l’absence de soutien social parfois entre collègues et
- la qualité empêchée.
Ces racines de la souffrance au travail ne sont visibles que lorsqu’une grave somatisation permet de déterrer un certain nombre de liens avec les conditions de travail. Malgré l’incidence des RPS, ce sont principalement les troubles musculo-squelettiques et les TMS, qui font office d’arbre qui cache la forêt et, en dehors des individus directement touchés, cette situation ne mobilise pas toutes les parties prenantes.Or, en amont des pathologies, on ne saurait trop insister sur l’intérêt d’une prévention engagée.
On sait que la grande majorité des individus est douée d’un sens moral capable de se ménager un environnement de travail respectueux des autres, mais seulement à condition de ne pas souffrir d’un manque à la fois de « temps pour bien faire », de reconnaissance et de solidarité (sur ce point, les primes d’intéressement aux services ne devraient-elles pas être encouragées ?
Cf. Article 78-1 de la Loi du 9 janvier 1986 renvoyant aux conditions définies par un décret).
Reprenons ici l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983, ne sommes-nous pas dans une impasse si l’on entend protéger les agents des incivilités de l’extérieur pendant que le New Public Management tend à altérer les relations de travail en milieu hospitalier ?
- La compétence juridictionnelle présente elle aussi de nombreux enjeux, notamment face au principe d’égalité puisqu’en fonction des situations et des liens de droit entre la victime et son environnement de travail, la réparation peut :
QUELLE COMPETENCE JURIDICTIONNELLE ?
Etre civile et pénale, mais aussi revenir au juge administratif (5 et 6). Par ailleurs, si aucun juge ne s’estime compétent, c’est alors le tribunal des conflits qui détermine la juridiction valablement saisie, ce qui tend à éviter un « déni de justice ».
EN CAS DE LITIGE, A QUI INCOMBE LA CHARGE PROBATOIRE ?
En principe, c’est au requérant de rapporter la preuve de sa prétention. Mais, en fonction de la nature d’une faute qu’il faudrait caractériser, la charge de la preuve peut être répartie au regard de l’inégalité des moyens dont disposent les adversaires.
Par ailleurs, il est plus difficile pour le justiciable de démontrer un fait négatif : par exemple une discrimination salariale assise sur un motif prohibé (un motif qui est le plus souvent dissimulé).
Ainsi, en matière de harcèlement ou de discrimination, le demandeur, autrement dit l’éventuelle victime, doit soumettre au juge des éléments de « fait » susceptibles de laisser supposer une faute de l’employeur, à charge pour ce dernier de s’en libérer par la preuve de sa bonne foi s’il n’entend pas reconnaître le moindre tort.
Le droit, s’il pose des solutions et consacre parfois des sanctions, n’a pourtant pas de miracle à proposer, sinon celui de renvoyer les sciences humaines à une dialectique indispensable pour restaurer le sens et l’éthique au travail, afin de limiter les dommages à la source.
La conséquence est simple puisque, en principe il n’y a pas de juge sans accusation :
- Les outils juridiques qui permettent de prévenir des comportements pathogènes au travail existent donc mais le droit est plus saillant lorsque le mal est fait (les exemples ne manquent pas : du harcèlement au suicide, en passant par les discriminations et les incivilités).
- La jurisprudence, elle aussi, occupe une place théoriquement moindre que celle de l’arsenal normatif. Elle agit dans l’amorce ou la prise en compte du changement social lorsqu’elle interprète la loi ou lorsqu’elle comble un vide juridique en correction de situations dépourvues d’équité.
QUELS OUTILS JURIDIQUES DE PROTECTION DU SALARIE ?
Peut-être l’émergence d’une nouvelle discipline, le neurodroit, nous promet-elle un avenir professionnel plus harmonieux par le biais des neurosciences comme outil dissuasif des malveillances entre collègues ?
Ou bien cette perspective ouvre-t-elle déjà plus d’inquiétudes qu’elle ne saurait apporter en progrès ?
Là aussi, nous pouvons craindre certains raccourcis et quelques détours en fonction de ce qu’on voudra prendre pour absolu ou relatif, peut-être moins qu’aujourd’hui, l’avenir en témoignera.
Pour en savoir plus :
Annie BARTOLI « Management dans les organisations publiques »
Angélique Del Rey, « La tyrannie de l’évaluation »,
Vincent de Gaulejac « La société malade de la gestion »
N’hésitez-pas à laisser vos commentaires… Hervé HENRY vous répondra avec plaisir !!!
Nous remercions vivement Hervé HENRY, Juriste et spécialisé dans le « Droit de la Santé & de la Protection Sociale », pour partager son expertise professionnelle en proposant cette Rubrique mensuelle, pour nos fidèles lecteurs du Blog MMS