N°2, Novembre 2016
Management et autorité
Un manager a en charge des budgets, une mission, une stratégie… mais aussi et surtout des personnes à « encadrer ». Mais qu’est-ce qu’encadrer ? Quel est le rôle d’un cadre de santé ? D’un directeur d’Ephad ? D’hôpital ? D’un chef de service ?
- Un cadre structure. Il fixe des limites pour mieux y voir clair, des espaces pour mieux se repérer, des interdits pour mieux dire entre nous comment naviguer dans des possibles et impossibles.
- Un cadre a aussi une position d’autorité, l’autorité qui n’a pas toujours bonne presse. Sans doute parce qu’on confond autorité et autoritarisme. Qu’est-ce que l’autorité pourtant ? L’autorité c’est augmenter l’autre, nous rappelle la racine latine du terme. La meilleure autorité est celle qui sait augmenter les connaissances, le bonheur, le travail, la sécurité, et même s’effacer pour laisser à l’autre la place d’exister.
C’est là qu’intervient la confiance.
De l’autorité à la confiance
Si vous ne laissez pas l’autre tenter, oser, se tromper… vous le téléguidez, vous ne le laissez pas grandir. « Si vous ne vous êtes pas trompé vous avez mal travaillé », clament certaines entreprises dites libérées qui veulent laisser plus d’autonomie aux salariés, pour plus de succès de tous. Sauf que dans le milieu de la santé, les erreurs ne sont pas anodines, elles concernent la vie et la mort.
- Pour autant, doit-on croire que le personnel de santé peut être infaillible ?
- Le droit à l’erreur existe-t-il aussi dans le monde de la santé ?
Une conversation de café m’avait par le passé marquée : « responsable qualité sur une chaîne de montage automobile, j’ai un objectif de zéro panne, zéro accident. Sauf que errera humanum est. On peut et on doit faire tout ce qui est en notre pouvoir pour l’éviter, et on doit accepter des autres le droit à l’erreur. Le jour où mon oncle chirurgien a raté une opération et que le patient en est mort, il était bien entendu meurtri et désolé, mais m’avait dit pour éclairer mon métier : c’était mon jour d’erreur. »
Croire à un monde sans erreur, sans incertitude, sans risque et sans mort, ce n’est pas réaliste. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’en prémunir ou s’y préparer.
Reconnaître ses erreurs pour réparer et transformer
Permis de conduire et permis à points
Comment garder confiance dans un monde d’erreurs potentiellement possibles ? Comment avoir une autorité qui sait déléguer, autonomiser, faire grandir avec nos fragilités et limites ? Prenons un exemple concret qui peut parler à tous, manager ou non.
Je ne donne pas les clés de ma voiture à un enfant de 10 ans.
Lorsqu’il atteint l’âge légal de la conduite, je sais qu’il va prendre des leçons de code et de conduite. Une fois son permis obtenu, est-ce que je le laisse conduire seul ? Est-ce que je reste assis à côté de lui à lui expliquer comment faire ? Un PDG me disait l’autre jour : le président est là à continuer de dire « tourne un peu à gauche, un peu à droite… on ne peut pas être deux à bord d’un volant. »
Ma confiance va se construire au goutte à goutte… Mais elle peut se perdre en litres.
- Si mon enfant casse ma voiture, est-ce que je lui retire ma confiance pour toujours ? Est-ce que j’admets que c’était un coup de malchance, que ça aurait pu arriver à tout le monde, y compris à moi ?
- Ou au contraire, sachant qu’il a commis une erreur grave,
- Je lui interdis définitivement de conduire ma voiture
- Je pense que son expérience lui servira de leçon, au point qu’on ne l’y reprendra pas à deux fois.
La confiance perdue peut se reconstituer si elle sait rester dialogue
- l’un qui reconnaît (pardon, excuses, aveu),
- l’autre qui accueille (écoute, confiance gardée mais recadrée),
- les deux qui décident ensemble des mesures possibles pour l’avenir.
Un médecin qui commet une erreur médicale sait-il l’avouer, demander pardon au patient et à ses proches, ou va-t-il cacher cela sous le boisseau, pour se dédouaner et protéger la réputation de son service, au détriment des patients qui n’attendent qu’un mot et un geste de sa part ?
Le droit à l’erreur existe pour tout un chacun et s’éduque.
- Le propre de la philosophie est l’étonnement : savoir se laisser surprendre. Parfois positivement, parfois négativement. Se laisser surprendre pour mieux apprendre.
- Le propre du management en milieu de santé est de savoir allier
- confiance et étonnement positif,
- sécurisation et audace,
- maîtrise et lâcher prise.
Car au final, la confiance est le prérequis de toute relation et de toute action constructives.
Avec la digitalisation des entreprises de tous secteurs, le big data et les IoT -Internet Of Things qui vont révolutionner notre vie et notre santé-, à l’heure où les algorithmes à plus grande échelle vont de plus en plus pré-dire et pré-orienter nos comportements et notre avenir, la confiance humaine reste plus que jamais au cœur de nos défis à vivre.
Muriel, avec toute ma confiance en l’homme et en l’avenir, une confiance joyeuse, lucide et exigeante.
Muriel, à votre disposition pour vous accompagner à oser déléguer, sécuriser, faire confiance.
N’hésitez-pas à laisser vos commentaires… Muriel ROSSET, vous répondra avec plaisir !!!
Nous remercions vivement Muriel ROSSET, Enseignante et formatrice en philosophie et management , innovation managériale, RSE et méthodes collaboratives (Universités Paris Descartes, Aix, Metz, EPF école d’ingénieur, Haute Ecole Ferrer de Bruxelles), coach, auteur & consultante, pour partager son expérience professionnelle en proposant sa Rubrique mensuelle, pour nos fidèles lecteurs du Blog MMS
3 Responses
Article très intéressant, tellement vrai.
Une grande aide lorsqu’on débute dans ce domaine et que l’on a l’impression de faire des erreurs chaque jour. Merci!!