N°4, MAI 2017
Changer une vision du monde peut mettre des millénaires. Ou pas ! Il suffit souvent d’un déclic ou d’une idée très simple pour sortir d’une crise, d’une solution sans porte (ouvrons alors les fenêtres !), d’un paradigme personnel ou collectif, d’une conception de la vie ancrée dans notre histoire. Car la seule histoire qui vaille, c’est l’histoire de la vie partagée qui nous rend pleinement vivants.
Liberté et compagnie : rendre le travail visible pour plus de bonheur au travail
La liberté dans les entreprises fait peur : reconnaître plus d’autonomie aux salariés, n’est-ce pas risquer l’anarchie, le bazar ? Perdre de vue les indicateurs, n’est-ce pas prendre le
risque de la non-qualité ?
A notre époque plus horizontale de réseaux, Isaac Getz , dans son livre « liberté et compagnie, ou comment la liberté des salariés fait le succès des entreprises« , constate que dans les entreprises libérées qui valorisent l’autonomie, le collaboratif et le bon sens partagé sont source de bien-être et de croissance financière.
Liberté et santé
Peut-on pour autant prendre ce même risque des entreprises libérées dans des hôpitaux ou maisons de retraite où ce n’est pas seulement de l’argent qui nous est confié, mais aussi la santé et la vie de personnes réelles ?
S’accomplir pour mieux servir
Frédéric Laloux, dans reinventing organizations, vers des communautés de travail inspirées, s’appuie d’abord sur notre personne à soigner pour mieux accomplir notre travail
- la maîtrise des peurs de l’égo : suis-je dans la peur du manque ou dans la confiance, l’abondance, l’émerveillement ?
- la justesse intérieure comme boussole implique la capacité à prendre des risques,
- la vie comme déploiement de soi et fidélité à soi, pour honorer ses dons : avoir de l’ambition plus qu’être ambitieux,
- la focalisation sur ses forces qui apprend à abandonner le jugement pour plus de compassion et appréciation,
- l’acceptation de l’adversité de bonne grâce, qui permet de lâcher la colère, la honte ou le reproche, boucliers pour l’ego mais médiocres enseignants pour l’âme,
- l’adoption d’une sagesse au-delà du rationnel pour honorer son intuition comme un muscle à exercer et écouter. « La pense intuitive est un don sacré et l’esprit rationnel est un bon serviteur. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et qui a oublié le don. » Einstein,
- l’authenticité en lien avec autrui, la vie et la nature.
Voir les entreprises privées ou publiques comme des organismes vivants
Dans « sortir du harcèlement moral, conseils d’experts », mon dernier chapitre « oser la bienveillance au travail» aborde la question du harcèlement moral des organisations. Comment sortir de ces impasses ? Frédéric Laloux, dans la logique d’Isaac Getz, propose 3 pistes
1. Moins de hiérarchie et plus d’auto-gouvernance
- = moins de command and control pour plus de leadership, afin de se décider ensemble sur des bases d’écoute, respect et conseil
- = l’égalité n’est pas égalité de pouvoir mais possibilité pour chacun d’agir
2. Plus de wholeness intégrité plénitude,
Oser venir au travail avec tout ce que nous sommes, oser la remise en question.
3. Une raison d’être évolutionnelle, une stratégie organique
- = moins de maîtrise, plus de compréhension de la finalité de ce que nous faisons.
- = accepter le temps des transitions, la mise à plat des conflits, l’accompagnement de coachs.
Hôpital numérique : le défi de nouvelles formes d’organisation
Suite aux restrictions budgétaires, les soins de santé à domicile des Pays-Bas se sont industrialisés au profit de grandes entreprises privées.
Face à la mauvaise qualité et à l’inefficacité de ces services conventionnels, Jos de Blok a décidé de les réinventer : en 2006, cet ancien professionnel de la santé crée Buurtzorg (en néerlandais « soins de proximité »), une entreprise visant à pallier à ces manques en mettant en place des petites équipes locales et autonomes, dédiées aux soins des clients du quartier et en interaction avec eux.
A l’heure de hôpital numérique où le patient deviendra de plus en plus acteur de ses soins, osons le dialogue de la nouveauté !
A votre disposition pour partager et accompagner avec vous mes expériences vécues d’entreprises libérées dans des administrations publiques belges (ministères) ou de profession actuellement en profonde mutation.
Alors, hôpital et maisons de retraite libérés : une folie ou une nécessité ?
A vous de le dire en partageant en commentaire vos expériences vécues d’organisations libérées, d’hôpital numérique ou au contraire d’hôpital en souffrance.
N’hésitez-pas à laisser vos commentaires… Muriel ROSSET, vous répondra avec plaisir !!!
Nous remercions vivement Muriel ROSSET, Enseignante et formatrice en philosophie et management , innovation managériale, RSE et méthodes collaboratives (Universités Paris Descartes, Aix, Metz, EPF école d’ingénieur, Haute Ecole Ferrer de Bruxelles), coach, auteur & consultante, pour partager son expérience professionnelle en proposant sa Rubrique mensuelle, pour nos fidèles lecteurs de http://localhost/managersante
9 Responses
Ah… les gentilles pensées pansement, qui couvrent les plaies mais ne guérissent pas, laissent se développer la gangrène et en definitive génèrent plus de problemes et de mal etre que ce qu’elles étaient censées guérir…
Quelques lectures : RH ouvrez les yeux, sur les chiffres que l’on nous assène régulièrement sur le « bonheur au travail » http://www.e-rh.org/index.php/blogs/les-articles-du-blog/239-rh-ouvrons-les-yeux
Entreprise liberee secte dogme et Rock’n’Roll : http://www.e-rh.org/index.php/emploi/les-articles-du-blog-3/230-secte-dogme-rock-n-roll
La mode de l’EL décroît en entreprise et c’est une bonne chose tant l’on constate et l’on reçoit des informations très inquiétantes sur cette perversité, qui releve le la maltraitance organisationnelle et de la volonté de la maîtrise des identités professionnelles (http://www.parlonsrh.com/entreprise-liberee-a-la-liberation-on-rase-gratis/) et donc releve de la manipulation des masses (relire Tchakotine : du viol des foules par la politique) l’Hopital est déjà suffisamment malade, victime entre autre de conflits de valeurs, d’excès de contrôle, etc… redonnons à la ligne hiérarchique des marges de manœuvre, la possibilité de régulations au plus proche du terrain et de respect pour l’ensemble des professionnels. On pourra alors parler d’intégration du numérique avec des collectifs de travail revigorés et pas uniquement avec du collaboratif techno-jambe de bois. Mais de grâce arrêtons de croire au sirop typhon
Tout d’abord bonjour cher Monsieur,
Je vous remercie pour ces remarques fort judicieuses qui montrent la diversité des expériences. La libération des talents est en effet un long chemin de responsabilité et aussi d’exemplarité. Elle laisse amers ceux qui sont abusés par ceux en parlent sans la permettre vraiment, ou ne savent pas bien l’accompagner.
La réalité, c’est qu’il n’y a pas de recette magique, juste un état d’esprit à développer et des expériences réussies à décliner dans un contexte donné ,toujours unique.
Loin des modes, je crois au pragmatisme éclairé et collaboré, qui forge les réputations.
Cela prend du temps, des efforts, de la rigueur et de la souplesse à la fois, bref, du management agile et du management pas les valeurs.
Et si nous portions nos efforts sur les solutions plus que sur les problèmes ? Il existe des excellentes méthodes collaboratives pour cela, que j’ai testées dans des situations bloquées.
Pour conclure, et sans nier qu’il existe de faux prophètes, ces personnes que nous avons certainement rencontrées vous et moi, tournons-nous vers Voltaire qui nous dit que « Ceux qui pensent que c’est impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui essaient »
La liberté n’a jamais été chose facile…sinon cela se saurait, mais notre devise française nous invite à la liberté, l’égalité et la fraternité qui relie les deux. En politique comme en économie,les deux se nourrissent mutuellement,avec la société civile et les salariés qui par les moyens du numérique et de nouvelles modalités de vivre ensemble, prennent leur part à ce défi.
« La France est un paradis de gens qui se croient en enfer » (Sylvain tesson) .La confiance manquant donc trop aux français, essayons tous d’en être digne et de la restaurer.
Je vous souhaite un excellent week-end ensoleillé ! Bien à vous
Je partage votre opinion, mais reste dubitatif car si nous dénonçons les faux prophètes pourquoi les reprendre dans votre article, notamment en ce qui concerne la manipulation des chiffres et études. Telle la marée, les mouvements visant à l’autonomie et la responsabilisation des collaborateurs (ici des agents) nous reviennent régulièrement, portés par des consultants qui y voient l’occasion d’un business facile. Telle la marée, les relents, les scories reviennent aussi inlassablement. Nombre d’études universitaires (réelles celles la) ont démontré que l’on échange sécurité contre autonomie et que l’on détruit avec les politiques de responsabilisation le fragile équilibre rétribution/contribution. Il nous faut changer mais nous ne devons pas confondre innovation et progrès, relayer ces fausses solutions empêche en definitive l’émergence d’autres modèles bien plus intéressants et respectueux des agents, patients et en definitive de notre société… avant toute chose réapprenons à écouter les équipes, le verbal et le non verbal, la solution est la et pas dans une pseudo mode manageriale dangereuse pour nos organisations à moyen terme …
Merci à nouveau pour ce partage Monsieur,
Au-delà de la libération des potentiels, il existe actuellement une lame de fond qui démarre avec la transformation numérique des entreprises, qui n’est pas une simple gestion électronique des données mais une vraie mise à plat des silos d’organisation et information.
Je suis allée récemment à une soirée organisée par l’école d’intelligence économique, avec notamment Gilles Babinet, digital champion de la France auprès de la Commission européenne, et Eric Mathieu, qui développe un remarquable moteur de recherche (Xaphir) face à Google.
Tous les deux m’ont confirmé les défis auxquels je crois autour de la transformation numérique des organisations, qui sont un potentiel de transformation économique et humaine à la fois.
Une chose m’a à la fois rassurée et laissée perplexe : Gilles Babinet lui-même, expert s’il en faut, a souvent lui aussi l’impression de prêcher dans le désert.
Si vous ne croyez pas aux entreprises libérées, ce qui est votre droit, le sujet de cette transformation numérique qui vient de récolter un ministère devrait vous passionner, tout comme celui du capital immatériel des organisations, (http://www.goodwill-management.com/fr/offre/capital-immateriel/capital-immateriel-de-l-entreprise ) qui valorise le capital humain, structurel et relationnel, bien au-delà du capital financier.
Bien à vous.
J’ai échangé à différentes reprises avec Gilles, le problème n’est d’ailleurs pas tant de prêcher dans le désert que nous cherchons à inflechir la marche d’un super-tanker avec nos petits bras. L’avenir que nous dessinons d’ailleurs est plus inquiétant que la marotte d’isaac getz car bien loin des valeurs humanistes que nous défendons et du discours marketing qui l’accompagne (peuplé de références schumpeteriennes) la révolution numérique n’est pas animée par des principes bienveillants mais économiques cette seule remarque balaye nombre d’idées préconçues par ailleurs : http://www.cfecgc.org/actualite/tout/intelligence-artificielle-l-rsquo-ethique-a-la-croisee-des-rh-et-du-big-data/ mais au delà des procès d’intention comprendre le fonctionnement des algorithmes permet surtout de comprendre que ce sont ceux qui les maîtrise et les alimentent qui façonneront nos fonctionnements et notre representation du réel (cf la théorie du collectionneur universel de JP Delahaye)
Pour finir une petite vidéo fort bien faite avec notre ami Stiegler : https://m.youtube.com/watch?v=4n2tWyIuA8g
Bonjour et merci de votre confiance à confier votre parcours et ce qu’elle illustre des soins en France, qui découle aussi des formations en santé.
Intervenant dans des formations de 5 promotions variées à Paris Descartes, où j’essaie en quelque sorte de transmettre autant la vie à partager que des idées théoriques, désincarnées et faussement rassurantes, je comprends ce que vous dites.
J’essaie à ma petite échelle d’apprendre à mes interlocuteurs à oser être pleinement eux-mêmes dans le respect et le service d’autrui. Pas facile mais pas impossible. J’ai donné cette année une journée d’empowerment pour faire vivre à la fois l’autonomie et la responsabilité. Une bonne formation, c’est pour moi peu de choses, mais qui marquent pour toute la vie, nous apprennent à travailler vraiment ensemble, et développent notre capacité d’apprendre à apprendre pour mieux savoir nous adapter aux changements de notre monde en mutation.
Dans mon prochain article MMS sur le management par la valeur, j’évoque le rapport d’Alan Fustec remis au CSE sur la valorisation du capital humain. Il dit une chose que je crois très vraie : nous avons besoin en France d’une psychothérapie collective visant à lutter contre notre anxiété mère de notre individualisme (on n’a pas les moyens de s’occuper des autres quand on craint de manquer pour soi) et de notre pessimisme (peur de l’avenir).
Les changements se font au goutte à goutte, comme la confiance se construit au goutte à goutte. Soyons activement confiants et constructifs ! Bon courage
Bonjour et merci pour votre long commentaire.
Mon accompagnement de personnes ou de systèmes bloqués m’a montré combien tout est affaire de regard et de patience pour en voir les fruits.
Oui il existe des situations absurdes, révoltantes, des profiteurs à l’ego mal placé…
Non ce n’est pas irrémédiable. Il suffit parfois de changer une personne, une méthode, et d’introduire l’accompagnement de cela par des personnes extérieures; Ce n’est pas un hasard si mon métier de coach se développe.
J’ai parfois assisté à des retournements positifs spectaculaires auxquels je ne m’attendais pas moi-même.
Au final, nous avons tous envie de trouver notre place au soleil sans nous retrouver isolés des autres. Bien sûr il existe des mondes opaques, des plafonds de verre, des entre soi difficiles à ouvrir. La chance du numérique, c’est de permettre de nouveaux liens, de nouveaux possibles, de nouveaux acteurs. La transformation numérique des organisations permet à la fois plus de croissance économique et de bien-être au travail. Elle commence tout juste, soyons confiants, patients et actifs.
A votre disposition et bon courage. Muriel Rosset 06 33 70 31 24
PS Dans le même ordre d’idée, je viens de sortir un livre d’amour et d’amitié, et le salon du livre auquel j’ai participé récemment m’a montré des gens découragés par la vie…Face à cela, il est important de partager des expérience positives et constructives.Je l’ai fait avec mon article sur les organisations libérées, voici un article qui dépasse la sphère professionnelle et montre notre besoin d’être unifié plus largement.
https://www.linkedin.com/pulse/quelle-est-la-diff%C3%A9rence-entre-lamour-et-lamiti%C3%A9-muriel-rosset?trk=v-feed&lipi=urn%3Ali%3Apage%3Ad_flagship3_profile_view_base_recent_activity_details_all%3BGOgA0ZgbrZW0vzZIyIFIOg%3D%3D