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Le processus de représentation commune (PRC) est-il un outil d’intelligence collective ? Réponse de Dominique BERIOT

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Article proposé par notre expert, Dominique BERIOT (spécialiste de l’approche systémique du changement et du management dans les entreprises depuis plus de 40 ans), conférencier  et auteur de nombreux articles & ouvrages 


N°12, Juin 2019 


À quoi sert le Processus de Représentation Commune (PRC) ?

Le PRC est une démarche utilisée pour définir les valeurs d’un projet d’entreprise, les missions d’une entité, les objectifs d’une équipe, la conception d’une charte, ou encore toute situation nécessitant une formulation commune des différentes représentations de chacun.

Il permet d’aboutir à une formulation écrite de la représentation, la plus consensuelle possible parmi celles des acteurs concernés. Il s’appuie sur des concepts systémiques. En effet, les noms et adjectifs que chacun utilise de façon préférentielle pour exprimer sa pensée sur un thème sont considérés comme les « éléments » de son propre « système pensée » et les verbes comme les « relations » entre ces éléments. 

Le but de l’animateur consiste à aider un groupe à organiser un nouveau système de « pensée collective » en choisissant, in fine, les éléments (noms et adjectifs) et les relations (verbes), reconnus par tous comme les plus représentatifs.

Son utilisation suppose de travailler avec des personnes suffisamment motivées et concernées par le sujet. Par ailleurs, le déroulement présentant une apparence un peu rigide et scolaire, il est judicieux d’avertir les participants afin d’éviter toute réaction négative.

Cette démarche a l’avantage de respecter les individualités et l’anonymat des représentations exprimées, de gérer facilement les différences, d’optimiser la cohérence d’expression du groupe, d’être rapide même lorsque la situation ou les enjeux sont complexes et enfin d’inscrire les participants dans une démarche d’intelligence collective et non d’opposition ou de compétition.

Comment mettre en œuvre le PRC ? 

1)   Faire émerger les représentations individuelles (15 à 20 min)

Formuler aux participants une phrase inductrice adaptée à la représentation commune  recherchée, par exemple : « Pour vous, le service public c’est quoi ? »

ou « Quelles sont pour vous les trois missions principales de notre société ? »

ou « A quoi souhaitez-vous aboutir avec votre plan de communication ? »

ou « Vous voulez mettre en place telle application de l’intelligence artificielle pour obtenir quoi ? ».

Et demander à chacun de rédiger pour lui-même une à trois réponses.

Processus de représentation commune

 

2)   Élaborer des sous-ensembles (20 à 30 min)

L’animateur constitue alors des sous-groupes de trois à quatre personnes et leur donne pour objectif d’organiser les représentations individuelles en sous-ensembles (deux à trois phrases). Ils affichent les résultats sur un support visible par tous (paper board, ordinateur…).

3)   Extraire les mots-clés (30 à 45 min)

De retour en « grand groupe », les phrases sont affichées et l’animateur fait émerger collectivement les mots (noms, adjectifs et verbes) communs à tous les sous-groupes ou reconnus par tous comme pertinents. Ces mots sont alors associés par thèmes.

4)   Élaborer des relations (verbes) entre les noms et adjectifs clés (15 à 25 min)

Réunis à nouveau en sous-groupes (pouvant être différents), les participants, disposant des mots-clés, vont élaborer à partir des verbes-clés retenus, les relations qu’ils considèrent comme les plus appropriées et constituer de nouvelles formulations pour chaque thème.

5)   Formuler la synthèse la plus représentative (30 à 40 min)

De retour en « grand groupe » un dernier travail consiste, pour chaque thème, à choisir parmi les phrases affichées celle qui est perçue par les participants comme la plus représentative. Les quelques modifications de rédaction nécessaires sont apportées collectivement.

Comment concrétiser les formulations communes ?

Les valeurs, missions ou objectifs qui ont fait l’objet de formulations consensuelles nécessitent souvent que certains contenus ou limites soient précisés afin de mieux orienter les personnes qui devront proposer des actions. Dans ce cas, on traduit les valeurs, missions, ou objectifs en termes de résultats attendus. Pour cela, il convient de proposer une question appropriée. Celle posée dans l’exemple suivant a été : « A quoi constatera-t-on que nous avons réussi ? ».

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Exemple 1 : Un PRC réalisé pour une direction régionale de France Télécom

Pour élaborer son plan de communication, le directeur régional décide d’impliquer ses collaborateurs. Il réunit quinze personnes motivées par le sujet. Il demande l’aide d’un intervenant extérieur pour animer le groupe de travail. Trois heures plus tard, en utilisant le PRC, le groupe débouche sur la formulation de trois objectifs traduits en résultats attendus. En voici les principaux extraits qui ont servi de repères d’actions appropriées pour chaque service concerné.

Objectif n°1 : Développer l’image de l’entreprise à l’extérieur et susciter l’intérêt de nos clients

– Vis-à-vis des médias

  • Le directeur général, les directeurs de production, commercial, financier et du personnel auront rencontré les responsables des principaux médias de la ville et du département.
  • Un certain nombre d’articles de presse et de reportages radio gratuits auront été réalisés.

– Vis-à-vis du marché

  • Le niveau de satisfaction de la clientèle aura été en progression.
  • Les demandes spontanées d’information provenant de prospects  auront augmenté.
  • Le nombre de nouveaux clients aura progressé par rapport à l’année précédente.
  • Le nombre de clients perdus aura diminué par rapport à l’année précédente.

Objectif n°2 : Permettre à chaque personne d’être acteur du développement de l’entreprise et devenir un ambassadeur auprès de la clientèle

  • Le nombre de fiches contacts-clients sera en augmentation.
  • Le nombre d’interlocuteurs pour un même client, sur un même problème, sera en très nette diminution.
  • Les critiques de la gestion des services et de l’organisation seront accompagnées de propositions.
  • Les propositions de modifications de procédures pour faciliter le service à la clientèle ne seront plus rejetées systématiquement.

Objectif n°3 : Donner à chacun des informations claires et fiables pour optimiser son activité quotidienne et assurer une cohérence entre le discours et la pratique.

  • Le nombre de cas où la clientèle est informée avant la force de vente sera en baisse.
  • Les changements de directives adressés par la hiérarchie au personnel seront en diminution.
  • Chaque responsable donnant une directive d’application, sera en mesure d’en préciser le but.

Pour chacun des résultats indiqués, des sous-groupes ont été constitués. Ils ont eu pour but d’élaborer un plan précisant les actions correspondantes avec, pour chacune d’elles, le responsable de la mise en œuvre, un délai de réalisation, une date intermédiaire pour faire le point.

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Exemple 2 : Un PRC réalisé avec le Comité d’Éthique de l’Institut Curie

Le Comité d’Éthique de cet Institut avait pour mission essentielle d’être consulté avant la mise en œuvre de tout essai thérapeutique sur l’homme. En 1991, la loi Huriet confiait cette responsabilité aux Comités de Protection des Personnes dans la Recherche Biomédicale. Les essais thérapeutiques étant traités au niveau départemental échappaient alors au comité de chaque hôpital.

Les membres du Comité de l’Institut Curie décident de poursuivre leur mission en la recentrant sur les aspects éthiques liés aux pratiques au sein de son hôpital. Ce groupe étant composé du directeur de l’hôpital, de trois professeurs (oncologie, médecine générale, pédiatrie), d’un médecin statisticien, de deux médecins généralistes extérieurs, d’un prêtre, d’un chercheur, d’une psychologue, de deux infirmières, du responsable du laboratoire d’analyses et de moi-même en tant que président du Comité et animateur du groupe.

Étant donné le contexte et ma connaissance du groupe, je n’ai pas considéré opportun d’organiser de sous-groupes. En préambule, nous nous sommes ajustés sur la raison d’être du nouveau Comité d’Éthique « respecter l’intégrité physique et mentale des personnes soumises à un traitement » (durée 20 min).

Il nous a fallu ensuite 30 min pour définir les nouvelles missions, puis 45 min pour formuler les résultats attendus. Ce consensus a été obtenu dans un domaine particulièrement complexe et dépendant fortement de valeurs personnelles, de professions différentes et d’enjeux individuels.

Mission n° 1 : Contribuer, par une réflexion en commun, à cerner la façon dont peuvent se poser les problèmes éthiques dans la pratique quotidienne.

Nous saurons que nous avons rempli cette mission quand nous serons capables :

  • De recueillir les questions du personnel médical et non médical.
  • D’identifier sur le terrain la manière dont surgissent les problèmes.
  • De proposer des recommandations.

Mission n° 2 : Susciter, organiser et développer la réflexion éthique du personnel médical et non médical.

Nous saurons que nous avons rempli cette mission quand nous constaterons que :

  • Le personnel médical et non médical participe à des réunions d’information et de réflexion éthiques.
  • Le personnel est informé des dispositions législatives et réglementaires.
  • Des conflits à propos de l’éthique s’expriment et se résolvent.

Mission n° 3 : Faciliter la mise en œuvre de l’information au malade

Nous saurons que nous avons rempli cette mission quand nous constaterons que :

  • Des notes d’information compréhensibles sont remises à tout malade entrant dans un essai thérapeutique.
  • Des enquêtes de satisfaction débouchent sur l’amélioration de l’information au malade.
  • Le dossier médical du malade contient systématiquement des informations sur ce qui lui a été dit.

A partir de ces résultats, le directeur de l’hôpital a décidé d’organiser un groupe de travail pour élaborer un plan d’actions à mettre en œuvre pour atteindre ces résultats.

 

Dans ces deux exemples, le PRC a facilité le rapprochement des différences de valeurs et d’enjeux, il a favorisé un consensus grâce à une approche mettant en jeu l’intelligence collective des acteurs.

 

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Version 2

 

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Nous remercions vivement  Dominique BERIOT  (spécialiste de l’approche systémique du changement et du management dans les entreprises depuis plus de 40 ans), conférencier  et auteur de nombreux articles & ouvrages, dont le dernier paru en Février 2018, « Guide systémique du manager d’équipe: 40 situations managériales du quotidien » aux Editions Eyrolles), de partager son expertise professionnelle avec nos fidèles lecteurs de www.managersante.com


Biographie de l’auteur : 
Dominique BERIOT, possède une triple expérience professionnelle. D’abord comme manager ou dirigeant dans cinq entreprises différentes de 2000 à 15000 personnes, puis comme consultant de l’entreprise de conseil qu’il a créée et spécialisée dans la conduite du changement par l’approche systémique. Il contribue à la diffusion de la pensée systémique à travers des conférences et des travaux de recherche. Dominique BERIOT a publié 6 ouvrages dans le domaine du management et, plus spécifiquement sur l’approche systémique du changement, dont les plus récents : – « 

Pour aller plus loin : 

Du microscope au macroscope

 


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Dominique BERIOT

Dominique BERIOT, possède une triple expérience professionnelle. D'abord comme manager ou dirigeant dans cinq entreprises différentes de 2000 à 15000 personnes, puis comme consultant de l'entreprise de conseil qu'il a créée et spécialisée dans la conduite du changement par l'approche systémique. Il contribue à la diffusion de la pensée systémique à travers des conférences et des travaux de recherche. Dominique BERIOT a publié 6 ouvrages dans le domaine du management et, plus spécifiquement sur l'approche systémique du changement : - "Guide systémique du manager d'équipe, 40 situations managériales du quotidien", Eyrolles, 2018. , - "Manager par l'approche systémique, s'approprier de nouveaux savoir-faire pour agir dans la complexité", Eyrolles, 2014. (préface Michel Crozier). - "Du microscope au macroscope, l'approche systémique du changement dans l'entreprise", (préface de Joël de Rosnay) ESF, 1992. - Management et Sécurité, la protection des personnes et des biens, Fayard, 1971. - Les tests en procès, (en collaboration avec Alain Exiga), Dunod, 1970. - Passeport pour l'emploi, (en collaboration avec Alain Exiga), Fayard, 1969. Il a publié de nombreux articles sur plusieurs sites et dans différentes revues spécialisées. Dans le champ de l'ingénierie pédagogique, il a réalisé des films et produit des CD pédagogiques sur le management. Il a également une expérience dans l'enseignement sur les relations sociales dans des Grandes Ecoles prestigieuses (HEC, CESA, ENST, ESCP...). Enfin, de 1987 à 1991, il a été Président du Comité d'Ethique de l'Institut Curie à Paris pour les essais thérapeutiques sur l’homme.

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Une réponse

  1. Merci pour cet article clair qui me donne des idées sur la création du « blason » de notre service;
    Actuellement, dans l’impossibilité de le mettre en œuvre puisque l’équipe est en grève, que je suis seule cadre pour 3 unités et que le service est en travaux….
    En 2020, peut-être !

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