N°4, Février 2018
Frédéric SPINHIRNY, directeur d’hôpital et auteur de l’Eloge de la dépense (2015) et de l’Homme sans politique (2017) aux Editions Sens&Tonka.
Le 8 novembre 2016, Le Parisien titrait « Grève : pourquoi les 700 000 infirmiers sont en colère ? ». L’article relatait la série de suicides qui a défrayé l’actualité, soulignant l’important malaise de la profession et la dégradation des conditions de travail. Médecins, sages-femmes, infirmiers, familles de victime : tout mouvement social dans la rue est une conséquence visible de la colère, fortement mobilisatrice. A l’hôpital c’est un fait, la colère existe et ses manifestations sont multiples. Pourtant, le management moderne se veut formel, centré sur les procédures et la gestion de projet, loin de l’expression des sentiments individuels.
Il produit ainsi une manière de gérer un établissement qui neutralise les passions pour mettre en avant l’objectivité de la raison. Même l’humanisation, le bonheur, le bien-être ou la bientraitance se conduisent avec les vêtements de la science et la méthodologie de la certification. Et cela a un coût social élevé et souvent minimisé.
C’est pourquoi, il est urgent de reconsidérer les passions comme moteur primordial des organisations de travail, et de se confronter au management de la colère.
Un sentiment puissant déclenché par une frustration
La colère est omniprésente désormais et fait les gros titres. Une enquête du Figaro en janvier 2017, sondait les lecteurs pour élire un thème à traiter par le quotidien: près de 10.000 personnes ont choisi la série intitulée «Les Colères françaises». Pour illustrer l’enquête, les reportages montraient successivement un village dans la Drôme confronté à l’accueil des migrants évacués de Calais, une ferme de la Manche frappée par la crise de la filière laitière, les difficultés qu’affrontent les PME française, une ville du Cher qui fait face à l’insécurité et enfin un hôpital où le service des urgences est débordé. En résumé, une France en colère.
Mais qu’est-ce que la colère ? La colère est une émotion déclenchée par une frustration. Nous ressentons une intolérance aux obstacles qui se mettent en travers de notre désir d’avoir ou d’être quelque chose. La colère est une exaspération, une explosion, une violence dirigée contre l’obstacle ou l’objet de notre intenable insatisfaction. Car lorsque je suis en colère, je ne tiens plus, il faut que « ça » sorte, et ça sort si bien, que « je suis hors de moi ». Quitte à ne pas me reconnaitre, à dire après-coup, « je n’étais pas moi-même », « ce n’était pas moi, c’était sous le coup de la colère ». Pourtant la colère me semble toujours justifiée sur l’instant, j’ai des arguments qui montrent l’injustice que je subis comme victime. Ma colère me semble toujours juste, saine. L’objet de ma colère, lui, mérite bien cela. Rien n’est exagéré de mon point de vue.
D’une manière significative, la culture nous a toujours mis en garde contre la puissance de la colère : c’est ce sentiment qui débute L’Iliade d’Homère, ou qui est désigné comme péché capital par la religion. Trop dépendante des passions incontrôlables du corps, à la guerre et à la vengeance, la colère est également liée à la bile jaune, le foie dans la théorie des humeurs chez Hippocrate. On lui préfère désormais l’indignation, plus feutrée, moins bruyante, rarement liée à notre situation personnelle, plutôt à un état du monde, à une injustice criante ou à une situation sociale dégradée. L’indignation est même recommandée, comme affirmation de soi. Indignez-vous ! écrit Stéphane Hessel. Mais la blessure narcissique passe avant le reste. Avec ou sans violence, j’ai envie d’en découdre. Rien n’y fait, c’est plus fort que moi. Et puis, j’ai d’ailleurs le droit de me mettre en colère. Aucune loi ne l’interdit.
Est-il vrai que nous sommes plus en colère aujourd’hui ?
Bien entendu, il n’existe pas de données statistiques sur la colère. Le sentiment est diffus, il s’agit d’une impression à la fois générale et intime, aux contours flous mais étonnamment proche de nous. Alors nous relions ce sentiment aux manifestations visibles de violence, agressions verbales et physiques, sensation d’insécurité quotidienne. Nous prêtons attention au nouveau vocabulaire que tout un chacun emploi : « scandale », « maltraitant », « harcèlement », « polémique », « mal-être », « burn-out », « la coupe est pleine, j’en peux plus, je vais craquer », etc. Des allusions aussi, des menaces, du chantage parfois. Collectivement, la société apparait moins solidaire et plus enclin au conflit.
En 2008, La Fondation anglaise pour la santé mentale[1] a publié un rapport intitulé « Point d’ébullition : Colère problématique et ce qu’on peut y faire » dont voici quelques conclusions :
- 84 % des sondés sont plus stressés au travail qu’il y a cinq ans.
- 65 % des employés de bureau ont déjà vécu une « rage de bureau ».
- 45 % des gens s’énervent régulièrement au travail.
- 60 % des absences au travail sont dues au stress.
- 33 % des Britanniques n’adressent plus la parole à leurs voisins.
- 64 % des sondés admettent ou sont convaincus que les gens en général sont de plus en plus en colère.
- 32 % des sondés disent avoir un ami ou un membre de leur famille qui maîtrise mal sa colère.
Plus récemment, dans son rapport d’octobre 2016, France Stratégie[2] décrit avec détail, les « lignes de faille » qui divise la société : entre riches et pauvres, entre ascension et déclin social, entre France de l’emploi et France du chômage, entre les jeunes générations et les autres, entre territoires prospères et territoires en déshérence, entre Français de différentes origines.
Le rapport souligne encore les rapports de plus en plus conflictuels qui existent entre les usagers et les agents du service public :
« Les acteurs en charge de la fourniture des services publics traversent une importante crise de légitimité. L’ensemble formé par les institutions de l’Union européenne, l’État, les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales est perçu comme une machine illisible, handicapée par les doublons, incapable de mener à terme des projets et essentiellement occupée à gérer ses défauts d’organisation et ses conflits internes (entre administrations, entre ministères, entre directions, etc.)5. Les agents des services publics s’épuisent à essayer de surmonter le désordre des institutions : la multiplicité des acteurs, l’accumulation des niveaux de responsabilité et la succession des réformes sont contradictoires avec les attentes de transversalité, de simplification et d’individualisation du service rendu ».
Même si 76 % des Français ont une bonne image de la Poste, les postiers sont victimes d’agressions et d’incivilités de plus en plus nombreuses. Le nombre d’incidents déclarés a plus que triplé entre 2008 et 2012. En 2014, les incivilités ont encore progressé de 9,5 %6. De même, les sapeurs-pompiers sont plébiscités par les Français, qui sont 99 % à leur faire confiance et 98 % à juger positivement la qualité du service qu’ils rendent. Pourtant, 1603 agressions de sapeurs-pompiers ont été recensées en 2014, ce qui représente une augmentation de 48 % en cinq ans.
A l’hôpital, une agression a lieu toutes les 30 minutes. Précisément, en 2014, 14 502 signalements d’atteintes aux personnes et aux biens ont été recensés auprès de 337 établissements sanitaires et médico-sociaux. Les chiffres sont en hausse de 17 % par rapport à l’année précédente qui avait vu 12 432 cas de violences rapportés à l’Observatoire National des Violences en Santé. Pour l’ONVS, beaucoup d’incidents surviennent « dans les services où l’attente du patient est forte, chargée en émotion et en angoisse (pédiatries, urgences) ou lorsque le patient estime que la prise en charge ne correspond pas à ses besoins ». Au-delà des chiffres, la violence change de forme et s’exprime. Et la moindre irritation, le moindre agacement, l’imprévu, l’impatience peut déclencher la colère. Il devient difficile de la contenir. Alors oui, manifestement, nous sommes de plus en plus en colère.
Les raisons de l’exaspération : colère et civilisation
Il est difficile d’expliquer les ressorts profonds qui animent les individus ou les foules en colère. Pourtant, nous allons avancer une interprétation. Celle-ci s’inspire d’une réflexion de Peter Sloterdijk dans Colère et Temps. Le philosophe propose en effet, une généalogie du sentiment de la colère et surtout, de sa captation par une « banque de colère ». Pour lui, historiquement, une institution collective détournait la colère des individus pour la placer en dehors de la vie terrestre.
Autrement dit, il a toujours existé des manières de promettre qui compensaient notre penchant naturel à entrer en colère et à agir violemment contre ce qui nous rend furieux. Et cela pour une raison simple : la colère est un affect puissant qui peut mobiliser une foule afin de renverser un pouvoir hégémonique. Ainsi, toute la tradition religieuse par exemple, est un travail pluriséculaire pour domestiquer la colère afin de la rendre impropre à l’homme (c’est un péché capital dont il faut se détourner et seul Dieu peut se mettre en colère).
Ce dogme propose en compensation une idée radicale : il existe un lieu céleste, hors du temps présent, où chacun recevra son dû en fonction de sa souffrance et de sa piété. Concrètement, tous les maux et les injustices de cette vie terrestre sont des épreuves nécessaires ; la justice, la vengeance et la récompense sont ainsi renvoyées à l’au-delà.
Ce paradigme religieux n’est pas le seul à contenir la colère, à différer la soif de vengeance, nous les retrouvons également dans toutes les idéologies collectives, notamment le communisme avec les « lendemains qui chantent » ou les croyances au progrès illimité de la technologie.
En somme, si nous pensons que notre situation malheureuse sera rapidement apaisée et soulagée dans un avenir meilleur et proche, nous sommes capables de rentrer la colère en nous ou de la sublimer dans un combat prophétique pacifié. C’est justement l’effondrement de ces idéologies consolatrices qui heurte la fin du XXe siècle et fait rejaillir la colère dans tous les aspects de la vie quotidienne et surtout dans les organisations de travail.
Nous manquons de compensation : pas de justice, pas de paix
Retenons cette idée forte : quelque chose nous retenait d’agir avec colère et cette compensation était suffisante. Et pendant longtemps, nous pensions que les progrès de la vie en commun et la mise en place d’institutions pacifiques, écarteraient les pulsions violentes des individus. C’est une des lectures que nous pouvons faire de l’œuvre de Norbert Elias, l’auteur de La civilisation des mœurs : le mouvement de la civilisation est un long processus pour polir les comportements personnels et faire tenir les citoyens entre eux, sans violence. Mais force est de constater que la politesse et la civilité sont un vernis bien mince pour contenir les passions humaines.
Commentant les intuitions freudiennes, Zweig, dans Le monde d’hier, l’avait compris et posait un regard lucide après les atrocités de la Première Guerre Mondiale :
« [Freud] était profondément bouleversé en tant qu’homme épris d’humanité, mais en tant que penseur ce terrible accès de bestialité ne l’avait pas du tout surpris. On l’avait toujours blâmé pour son pessimisme, parce qu’il niait la suprématie de la culture et de la civilisation sur les pulsions. On voyait à présent qu’il était impossible d’extirper de l’âme humaine le fond barbare, la pulsion destructrice […]. Peut-être que dans les siècles à venir, on trouverait le moyen de réprimer ces instincts, au moins dans la vie en commun des peuples ; mais dans la vie de tous les jours et dans la vie intime de l’être, ils subsisteraient comme autant de forces indestructibles et peut-être indispensables pour maintenir une certaine tension ».
La colère est ainsi une passion nécessaire et intrinsèquement liée à l’humain. La perte des institutions pouvant capter ce flot de fureur a laissé retomber sur la vie quotidienne et terrestre, tous les mouvements d’humeur et leur violence. Un autre phénomène accentue encore ce renversement : nos méthodes pour pacifier la société ne sont pas aussi puissantes que ces banques de colère. En effet, pour compenser la faillite des idées collectives, les institutions développent des modes de comportement basés sur la gestion pacifiques des conflits, les normes et les procédures scientifiquement prouvées, la rationalité froide et le consensus.
Pourtant depuis les années 80, moment charnière où la dernière idée collective, le communisme, s’est effondrée, le progrès scientifique lui-même achoppe face la montée inquiétante de la brutalité au quotidien, avec son cortège d’incivilités, de dégradation, d’agression, d’insécurité. Rien ne vient tarir l’excès de colère, exprimé de plus en plus intensément, que ce soit dans les relations internationales où les crispations s’accentuent ou dans les micro-agacements du quotidien.
Comment manager la colère au quotidien ?
Nous vivons donc un moment critique. Les forces colériques se sont réorientées, non vers un nouvel au-delà chimérique, mais vers d’autres objets de compensation concrets (consommations d’objets techniques, projets à court terme, carrière, pratiques à fortes sensations) dont les réponses sont toujours insatisfaisantes, ce qui renforce encore et toujours le niveau de colère.
Toutes les formes institutionnelles et leurs représentants sont désormais mis en doute. Tous les jours, tout est toujours frustrant. Il incombe donc à chaque personne exerçant une responsabilité, de répondre correctement à la colère et d’en subir la décharge. Dans une organisation de travail, les cadres de direction sont en première ligne. Dans les établissements plus complexes, et notamment au cœur du service public hospitalier, ce sont d’innombrables réseaux de colères qui éclatent : patients contre soignants, patients entre eux, soignants entre eux, médecins contre directeurs, directeurs entre eux, médecins entre eux, organisations syndicales contre administration mais aussi désormais agents contre les organisations syndicales, directeurs contre leurs tutelles.
En somme, chacun est confronté à la colère et doit la recevoir, accentuant donc par-là, le besoin de soi-même décharger cette énergie négative reçue par un autre. Gardons à l’esprit cette métaphore la tension et de l’énergie sociale, ce subtile équilibre à trouver pour calmer le jeu : sans compensation ou récompense, tout le monde décompense. Par conséquent, deux perspectives nous semblent adaptées pour répondre à la colère.
La colère et le conflit comme modalité du dialogue social
La première est le management de la colère en tant que tel. Il faut considérer que la colère est l’un des modes de régulation des rapports personnels au travail. A ce titre, manager la colère devient une compétence indispensable à mesure que celle-ci augmente. Nous ne pouvons plus affirmer que ce manque de sang-froid est une erreur de comportement ou le seul apanage des organisations syndicales dont l’essence reprenait le flambeau des promesses d’un avenir meilleur et gouvernés par la justice.
Aujourd’hui le ressentiment comme moteur social se trouve à tous les étages de l’hôpital. Il est urgent de reconnaître que le management moderne s’appuyant sur les procédures, les protocoles, la gestion de projet par consensus, la rationalité scientifique, trouve aujourd’hui ses limites. Manager par la théorie éclipse la mobilisation des passions, qui finissent toujours par s’exprimer d’une manière brutale[3].
Tempête et passion sous un tableau Excel
La technique et l’automatisation des tâches ne peuvent répondre qu’imparfaitement à la sensibilité des individus[4]. Qu’est-ce que la gestion et les experts leur donne à voir, à espérer comme stimulation ? Il faut en convenir, gérer ce n’est pas promettre. Le problème de management devient politique et semble complexe car il s’agit encore aujourd’hui de pratiquer la cohésion comme art plastique, comme mélange entre les différentes formes d’aspiration sans provoquer la colère inutilement. Pour tous, il faut proposer un contenu voire un contenant. Une promesse certes, et surtout des engagements, puis des réalisations qui augmentent la force de la promesse initiale. C’est un équilibre délicat à trouver entre promesse et utilité, mobilisation et repos, accalmie et tempête, accélération et lenteur, bref, une respiration, un mouvement de l’âme.
Aujourd’hui, toutes ces formes que prend la colère font signe vers l’impossibilité de se projeter intimement vers un objet positif et permettant de consolider un tissu social. Michel Henry évoque cette menace qui se tapit dans l’ombre d’une civilisation aux projets stériles et uniquement orientées vers l’efficience scientifique: « la barbarie est une énergie inemployée ». Ça bout, car il faut qu’il se passe enfin quelque chose. Alors proposera-t-on seulement de nouveaux ennemis pour user cette énergie ?
N’y-a-t-il pas d’autres manières de mobiliser ? Notre management de la colère sera donc celui qui stimulera à bon escient cette énergie, cette tension toujours présente, sans jamais la laisser déchargée trop longtemps.
Il y a plus : les managers doivent réapprendre à comprendre comment l’individu fonctionne affectivement et psychologiquement, loin des sciences de gestion. Il faut reconsidérer la vertu de la synthèse, du consensus et les managers qui refusent le conflit par paresse ou lâcheté. Si nos moyens d’actions sont débordés par le contexte hors hôpital ou les facteurs environnementaux qui provoquent la colère ( déception familiale ou amoureuse, menace ou atteinte à la sécurité dans la société, période de stress ou de fatigue), il nous reste à savoir réorienter le discours interne qui interprète les évènements négativement pour générer la fureur.
Car les principales sources de la colère sont :
- la mauvaise interprétation des événements,
- la trop forte exigence envers soi-même,
- la sensibilité à l’injustice ou encore
- l’incapacité à exprimer ses émotions correctement,
- à poser des mots sur des sentiments confus.
Pour cela, il faut se confronter aux agents en colère. Et partager cette énergie pour diminuer son intensité.
Maîtriser sa colère, une discipline stoïcienne
Cependant, n’oublions pas la deuxième perspective pour manager la colère. C’est une question de formation, une question d’éducation personnelle, de culture voire d’éthique : gérer soi-même sa colère. Il s’agit donc de réaliser une introspection fine des moments où va s’exprimer la colère, de reconnaître les symptômes physiques et psychologiques qui accompagnent le mouvement de fureur :
- Nœuds dans l’estomac
- Poings ou mâchoire serrés
- Respiration rapide
- Maux de tête
- Besoin de marcher, pieds qui tapent le sol d’une manière répétitive
- Problèmes de concentration
- Cœur qui palpite
- Tensions dans les épaules
- Répétitions des mêmes thématiques liées à la déception
- Le besoin de vengeance suite à un échec
Et donc apprendre à s’astreindre, à se réfréner. A prendre soin de soi. A pratiquer certains exercices au bon moment. Par exemple, en situation de forte tension, plusieurs techniques peuvent apaiser la colère :
- Concentrez-vous sur les sensations physiques de la colère
- Respirez profondément plusieurs fois, comptez lentement jusqu’à dix
- Bougez et détournez votre attention de la situation qui vous obnubile
- Étirez ou massez les zones de tension, se relaxer pour se « détendre »
- Parlez-vous pour essayer de cerner pourquoi vous vous emportez
- Forcez-vous à trouver un argument qui donne raison à celui/celle qui vous met en colère
Il s’agit donc de revenir à la sagesse stoïcienne qui veut maitriser les passions, parce que celles-ci trompent le jugement en provoquant l’emportement. Chacun peut s’exercer à examiner ses passions et à réaliser une direction de conscience qui mène à l’apathie, à l’impassibilité. Nous pourrions imaginer des formations données dans les hôpitaux, tout comme il existe des cours de relaxation et de gestion de situations de conflit.
La colère, une passion d’avenir
Voici donc nos perspectives pour contrer la colère.
Diminuer les sources qui irriguent le sentiment d’injustice, notamment en étant soi-même exemplaire et en offrant toujours une compensation acceptable pour les individus en soif de justice.
Ou bien investir dans la maîtrise de soi, long processus qui permettra de limiter les irruptions de fureur. Mais ce n’est pas donné à tout le monde car il en va d’une forme de discipline et de culture qui prend du temps, à l’opposé du rythme qu’imposent les transformations à l’hôpital.
Au-delà de ça, il s’agit surtout de reconsidérer la colère comme une passion centrale des interactions sociales et plus on l’ignore, plus elle réapparaît avec force. Ainsi, loin de nous l’idée de maîtriser jusqu’à anéantir la colère mais plutôt de la réinsérer comme puissance sociale au cœur de l’hôpital.
Pour aller plus loin :
[1] Mental Health Foundation, Boiling Point: Problem anger and what we can do about it, 2008
[2] France Stratégie, Lignes de faille : Une société à réunifier, 2016
[3] Pierre Hassner, La revanche des passions. Métamorphose de la violence et crises du politique, Fayard, 2015.
[4] Nous invitons le lecteur à approfondir cette analyse des liens entre automatisation et sensibilité dans L’homme sans politique. Essai sur le pouvoir automate, Sens&Tonka, mai 2017.
Nous remercions vivement Frédéric SPINHIRNY, Directeur des Ressources Humaines chez Hôpital Necker-Enfants Malades, Rédacteur en Chef de la Revue Gestions Hospitalières, pour nos fidèles lecteurs de www.managersante.com
Biographie de l’auteur :
Directeur des Ressources Humaines chez Hôpital Necker-Enfants Malades, Rédacteur en Chef de la Revue Gestions Hospitalières. Directeur adjoint à l’Hôpital Universitaire Necker-Enfants Malades, ancien élève de l’École des Hautes Études en Santé Publique. Diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris et titulaire d’une licence de philosophie. Enseignant en Prep’Ena à l’IEP de Paris et auteur de deux essais de philosophie aux Editions Sens&Tonka (« L’homme sans politique », 2017, « Eloge de la dépense », 2015)
Jean-Luc STANISLAS, Fondateur de managersante.com (photo à droite) tient à remercier vivement le Frédéric SPINHIRNY (photo à gauche) pour partager régulièrement ses réflexions dans ses articles passionnants sur les innovations en stratégies managériales pour nos fidèles lecteurs sur notre plateforme d’experts.