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« Case Manager » : comment ce type d’accompagnement pourrait-il s’appliquer auprès des malades chroniques à tout moment de leur vie ? (2ème Partie)

Nouvel Article de notre experte  Mélodie FORTIER, (diplômée de Paris-Sorbonne Université, CELSA, et actuellement Leader du Secteur Santé chez ANEO Conseil),  publié en étroite collaboration avec Capucine DAO, (analyste conseil en santé) 


N°5, NOVEMBRE 2018


 

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Relire la 1ère partie de cet article

 

Développée depuis une dizaine d’années en France la gestion de cas est pour lors majoritairement destinée aux personnes âgées.  Néanmoins, les compétences nécessaires à la gestion de cas et la méthode d’action peuvent être adaptées à d’autres publics ayant des problématiques proches : en effet, les personnes atteintes de maladies mentales ou de pathologies chroniques sont également susceptibles d’avoir des parcours de soins complexes du fait de la multiplicité des acteurs médicaux, médico-sociaux et sociaux qui interviennent auprès d’elles. La formation de gestionnaire de cas est en constante évolution depuis sa création en 2009.

Bien qu’ils ne soient pas toujours nommés comme tels, des modes de prises en charge inspirés de la gestion de cas émergent dans le champ de la santé mentale. Les maladies mentales sont aujourd’hui identifiées comme une problématique de santé majeure par l’Organisation Mondiale de la Santé et touchent un nombre croissant d’individus au cours de leur vie.

Une prise en charge intégrative sur le modèle de la gestion de cas serait d’autant plus pertinente qu’il s’agit de patients, du fait de leur pathologie, susceptibles d’être en rupture de soins et isolées socialement. Ce mode de prise en charge permet également une meilleure concertation entre les acteurs, ce qui dans ce  domaine est particulièrement utile du fait des connaissances inégales des professionnels concernant la psychiatrie.

Exemple d’accompagnement pour les pathologies mentales : 

Ainsi le rapport sur la Santé mentale de Michel Laforcade cite plusieurs initiatives mises en place à l’échelon local et dont le modèle se rapproche de celui de la gestion de cas. A Perpignan une « Cellule de Traitement des situations complexes » portée par la commune et Centre hospitalier de Thuir réunit les différents acteurs de terrain impliqués dans la prise en charge des personnes atteintes de troubles de l’humeur.

Ses objectifs peuvent être comparés à ceux d’une MAIA car il s’agit en effet « d’éviter les hospitalisations sans consentement », d’« élaborer une analyse précise des situations complexes à travers leurs différentes dimensions – sociales, sanitaires, habitat. » et de « préconiser un plan de prise en  charge » , un vocabulaire proche de celui utilisé pour décrire l’évaluation et le plan de prise en charge individualisé réalisé par les gestionnaires de cas pour les personnes âgées. Ce dispositif est complété par une équipe mobile de psychiatrie qui intervient sur le même principe que les gestionnaires de cas, c’est-à-dire par sollicitation des partenaires afin de réaliser des évaluations psychiatriques de certains patients.

Au-delà de son rôle auprès des patients, l’équipe mobile se fait le lien avec les différents intervenants dans le champ de la santé mentale et les sensibilise aux spécificités de la psychiatrie parfois méconnues des professionnels des champs sanitaire et social.

Un tel dispositif n’est pas isolé et dans les faits un case management spécifique à la santé mentale est en train de se développer en France à tel point que la revue Santé mentale lui a consacré un dossier complet en mars 2017.

Exemple d’accompagnement pour les pathologies somatiques : le cas des maladies infectieuses 

Au-delà de la santé mentale, la gestion de cas est également développée pour des malades chroniques et notamment pour les personnes vivant avec le VIH. En effet, depuis plus de 20 ans, les traitements antirétroviraux permettent aux personnes porteuses du VIH de contrôler le virus et d’avoir une espérance de vie presque égale aux personnes séronégatives.

Or les nouvelles contaminations touchent aujourd’hui à 45% des personnes appartenant à des populations dites clés que sont les travailleurs du sexe, les usagers de drogues injectables, les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes ainsi que leurs partenaires et les détenus.

Cependant ces populations sont également les plus éloignées des services de santé dont elles auraient besoin selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Le « traitement comme prévention » étant l’un des éléments clefs pour le contrôle de l’épidémie, il est particulièrement important d’éviter des ruptures de parcours de soins c’est-à-dire que des patients dépistés soient « perdus de vue » et cessent de recevoir leur traitement.

Par conséquent, la gestion de cas peut être une réponse adaptée à nécessité de coordonner les acteurs médicaux, médico-sociaux et sociaux susceptibles d’intervenir dans la prise en charge des PvVIH.

Un tel dispositif est expérimenté pour le suivi des personnes atteintes du VIH (PvVIH) dans le contexte spécifique de la frontière franco-brésilienne. En effet, les PvVIH qui résident sur la zone frontalière entre la Guyane et le Brésil ont un accès difficile aux soins (Le Centre Hospitalier de Cayenne étant à 3 heures de route) et du fait d’un faible niveau socio-économique dans la région elles cumulent les vulnérabilités (précarité, inactivité, non maîtrise de la langue française, etc).

Dans le cadre du projet transfrontalier « Oyapock Coopération Santé » une gestionnaire de cas propose un accompagnement afin de coordonner le parcours des patients atteints par le VIH en travaillant en lien avec les équipes du centre de santé local, mais également avec les médiateurs des associations françaises et brésiliennes présentes sur le territoire afin d’éviter les ruptures de soins et donc participer au contrôle de l’épidémie.

Pour conclusion :

Le système de santé français prend de plus en plus en compte la part croissante de patients chroniques et âgés dont le suivi nécessite un accompagnement dans le temps long, à l’opposé du modèle de prise en charge des maladies aiguës sur lequel s’est bâti notre système hospitalier. En outre, du fait de la complexité des situations de certains de ces patients, qui dépasse le seul champ médical, de nombreux acteurs sociaux et médico-sociaux participent également à leur suivi.

Le gestionnaire de cas, s’il ne constitue pas une réponse unique, permet pourtant de penser un accompagnement des patients par un professionnel ayant une vision transverse de leur situation dans ses dimensions biopsychosociales.

La transversalité permet en outre de coordonner les différents acteurs et d’ouvrir au dialogue et à la concertation pluri professionnelle autour de la situation d’une personne. Au-delà de la prévention des hospitalisations ou des placements en institutions spécialisées, le rôle, la fonction et la mission du « gestionnaire de cas » ont permis et permettent de repenser le suivi de patient, de garantir une cohérence de parcours et de poser les bases d’une responsabilité collective des acteurs, quel que soit son parcours.

Depuis presque 10 ans, les gestionnaires de cas exercent dans plus d’une centaine de structures à but non lucratif sur l’ensemble du territoire. Les gestionnaires de cas sont les représentants d’une nouvelle manière de penser le maintien à domicile pour les patients atteints de la maladie d’Alzheimer et les personnes âgées en général.

La gestion de cas met en lumière le changement de paradigme nécessaire qui s’opérera, en donnant une vision systémique au parcours du patient ; au-delà des murs de l’hôpital, au-delà des soins, au-delà des cloisons qui séparaient les champs du soin, du médico-social et du social.

A l’instar du système éducatif qui s’est lancé depuis plusieurs années dans une méthode d’accompagnement comparable avec le dispositif de réussite éducative qui permet d’articuler l’ensemble des acteurs éducatifs, sociaux, médico-sociaux et du soin autour des enfants en difficulté.

Et pourtant, l’un des enjeux majeurs du dispositif MAIA reste l’information et la communication pour mobiliser l’ensemble des acteurs, faire connaitre les ressources disponibles sur le territoire, et ainsi orienter les familles vers le service adapté. L’information et la communication permettraient de diffuser, d’étendre le périmètre d’un dispositif tel que MAIA à l’ensemble des patients nécessitant un maintien à domicile ; personnes en situation de handicap, patients en santé mentale, patients chroniques, patients temporairement invalides ou hospitalisés.

Ainsi à devenir la pierre angulaire du maintien à domicile ; défi des prochaines années. Ce dispositif pouvant être applicable, adaptable et évolutif permet également d’imaginer son déploiement à d’autres patients, à d’autres domaines pour la décentration du service aux usagers, pour une vision systémique des parcours de soins, des parcours de vie.

 


Pour aller plus loin :

 

     


 

Nous remercions vivement Mélodie FORTIER, (diplômée de Paris-Sorbonne Université, CELSA, et actuellement Leader du Secteur Santé chez ANEO Conseil),  publié en étroite collaboration avec Capucine DAO, (analyste conseil en santé) , pour le partage de leur expertise pour www.managersante.com 


Biographie de l’auteure : 

Mélodie FORTIER est diplômée de Ecole des Hautes Etudes en Sciences de l’Information et de la Communication de Paris-Sorbonne Université (CELSA). Elle propose son expertise depuis plus de 10 ans dans le conseil pour le secteur de la santé et de la protection sociale.
Aujourd’hui, elle occupe les fonctions de Leader du Secteur Santé chez ANEO, entreprise libérée, 1er Cabinet en Human Innovation. Mélodie FORTIER mobilise son savoir faire pour accompagner les entreprises et institutions sur des projets d’envergure de mise en oeuvre de processus qualité, dans le management, le lean à l’hôpital, le développement de stratégies de gestion du changement ayant un impact sur les processus, l’organisation, les ressources humaines, les formations et les communications.
Mélodie a occupé antérieurement les missions de Chef de Projet à l’ANAP (Agence Nationale d’Appui à la Performance). Dans ce cadre, elle a assuré des missions d’organisation de plan de communication sur des projets internes. Mélodie FORTIER participe aujourd’hui à des événements nationaux, en lien avec les innovations et les nouvelles technologies dans le domaine de la E-Santé.

 

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Mélodie FORTIER

Mélodie FORTIER est diplômée de Ecole des Hautes Etudes en Sciences de l'Information et de la Communication de Paris-Sorbonne Université (CELSA). Elle propose son expertise depuis plus de 10 ans dans le conseil pour le secteur de la santé et de la protection sociale. Aujourd'hui, elle occupe les fonctions de Leader du Secteur Santé chez ANEO, entreprise libérée, 1er Cabinet en Human Innovation. Mélodie FORTIER mobilise son savoir faire pour accompagner les entreprises et institutions sur des projets d'envergure de mise en oeuvre de processus qualité, dans le management, le lean à l'hôpital, le développement de stratégies de gestion du changement ayant un impact sur les processus, l'organisation, les ressources humaines, les formations et les communications. Mélodie a occupé antérieurement les missions de Chef de Projet à l'ANAP (Agence Nationale d'Appui à la Performance). Dans ce cadre, elle a assuré des missions d'organisation de plan de communication sur des projets internes. Mélodie FORTIER participe aujourd'hui à des événements nationaux, en lien avec les innovations et les nouvelles technologies dans le domaine de la E-Santé.

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