N°5, Juin 2016
Petites définitions :
«Un système de management de la sécurité et santé au travail a pour but l’amélioration des conditions de travail, de manière générale et partagée (tous les acteurs) : il s’agit d’une méthodologie d’amélioration de la performance de la sécurité/santé au travail basée sur des schémas de prévention, des procédures, des plans d’action, impliquant chaque niveau de responsabilité.
Le schéma de développement d’un système de management de la santé / sécurité s’inscrit dans une dynamique de changement qui requiert de la pédagogie, une démarche participative et collaborative.»
Un système en cause ?
Une grande majorité des personnels hospitaliers sont des opérateurs, avec des niveaux de qualification très élevés : les médecins aux soignants, tous sont des opérateurs du soin. La première conséquence de cela est le peu de temps donné au management et aux projets transverses. Il est en effet notoire que dans une entreprise, les opérateurs passent en moyennent 80 à 90% de leur temps à réaliser les opérations, contre 10 à 20% de leur temps à gérer des projets. Il existe très peu d’équipes support dédiées aux projets d’organisation, ce qui est une des raisons des difficultés de mise en œuvre et surtout de pérennisation de démarche innovante.
Il est également notoire, dans les industries qui ont mis en place des projets de transformation, que la difficulté à impliquer les collaborateurs, «procédurer » par exemple le travail, est d’autant plus grande que la qualification des opérateurs augmente . Même si ce comparatif entre l’industrie et l’hôpital peut être gênant, mais c’est dans l’industrie que nous avons le plus grand recul sur les théories des organisations et de l’efficacité opérationnelle.
Ce type d’organisation est assez caractéristique dans les milieux de type fonctionnel, ou l’expertise est importante. Ainsi, on trouve en général une direction des soins, une direction des travaux, une direction des achats et de la logistique, plusieurs directions RH (en fonction des statuts des personnels), etc, qui ont souvent du mal a collaborer sur des projets impliquant les patients et les processus transverses.
Alors que le parcours du patient est quant à lui complètement transversal.
Et si l’on occulte toute considération humaine, le dernier grand constat est le «marché», l’une des problématiques de l’hôpital, qui est liée à son financement particulier. L’impossibilité d’ajuster ses prix en fonction de la qualité fournie, et donc de ses coûts réels . Ce qui engendre aujourd’hui en France tout le débat de la réduction ou maîtrise de ces coûts afin de rétablir un équilibre avec un besoin qui lui ne cesse de croître.
Voici donc 3 grandes raisons qui font que la prévention santé est peu implantée dans les milieux hospitaliers, en résumé:
- Le peu de temps et de moyens accordés à la réflexion, l’innovation plutôt qu’à l’action
- Un fonctionnement en silo, néfaste à la vision globale qui renforce les oppositions.
- La pression financière exercée qui entraîne des modes de managements aux «moindres coûts», des décisions biaisées par des enjeux court-termiste.
Le management par la prévention santé sécurité sera donc vouée à l’échec, mais comme tous les autres moyens d’organisation (qualité Iso, lean hospital, et autres normes) le serait. Il faut faire tomber ces barrières mentales car les investissements dans la prévention santé / sécurité, tout considération humaine gardée, sont rentable, mais ce n’est qu’une conséquence et non une finalité.
Un système global ne peut émerger, améliorer et perdurer que si des ponts peuvent être franchis, les organisations transverses au-delà des fonctions et hiérarchies et non soumis à un impératif budgétaire court-termiste.
Nous remercions vivement Johnny Keire, Consultant en management de la prévention des risques santé-sécurité, de Théos Consulting, pour partager son expertise professionnelle en proposant sa Rubrique mensuelle, pour nos fidèles lecteurs du Blog MMS