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Pourquoi 2020 pourrait bien être l’année de « l’expérience patient » ? Entretien avec Amah KOUEVI, Directeur de l’IFEP proposé par Joséphine ARRIGHI DE CASANOVA

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N°3, Octobre 2019


 

Nouvel Article publié par notre experte Joséphine ARRIGHI DE CASANOVA. Spécialiste des chatbots de santé (voir dossier publié par notre partenaire Beesens), elle conseille les intervenants du secteur de la santé dans la conception et la mise en œuvre d’outils numériques. Également Conseil en Marketing et Communication dans les secteurs santé / bien-être.

Cet article-interview d’Amah KOUEVI (Fondateur de l’Institut Français de l’Expérience Patient) est proposé en exclusivité pour nos lecteurs de www.ManagerSante.com.

 

Pour la personne de marketing que je suis, il a été surprenant d’apprendre que l’expérience patient serait un concept récent importé du Canada dans les années 2010, et dont les contours demeurent encore flous. Où en est-on dix ans après ? Quels effets produit l’introduction de cette notion sur l’écosystème de santé ? Et comment l’Institut Français de l’Expérience Patient entend développer ses missions dans les mois à venir ? Amah Kouevi, son Directeur, nous répond.

Qu’est-ce que l’expérience patient ?

En marketing, l’expérience client [1] correspond au vécu et à la perception, par le client, de l’ensemble des interactions et relations avec une entreprise, une marque ou un produit/service. Théorisée au début des années 1980, elle englobe le champ fonctionnel (ce que fait le client lors des interactions au cours de son parcours) et le champ émotionnel (ce que ressent le client). L’expérience client est considérée comme une source de la satisfaction et de la fidélisation, de même qu’une source de recommandation et d’influence, particulièrement convoitée à l’heure du digital.

Transposée au domaine médical, l’expérience patient[2] est composée de l’ensemble des émotions et sentiments ressentis par un patient dans le cadre d’un parcours de soins, c’est à dire avant, pendant et après la réalisation des soins. Bien que la notion d’expérience patient puisse également s’appliquer à des soins ponctuels ordinaires, elle est surtout utilisée dans le cadre de parcours de soins réalisés en milieu hospitalier. Elle se caractérise par l’importance d’éléments caractéristiques de l’univers de la santé tels le stress, l’attente, la transparence et la compréhension des parcours de soin, ainsi que l’empathie des hommes et des organisations.

Amah Kouevi vient enrichir cette définition :

« Si l’expérience patient est un concept jeune et parfois caricaturé, le principe est aussi ancien que la médecine, dont il vient enrichir et éclairer les pratiques. Il nécessite de prendre en compte non seulement les facteurs subjectifs liés au ressenti du patient, mais aussi ceux liés aux soins et aux résultats en termes de santé. C’est pourquoi la prise de décision médicale partagée et l’éducation thérapeutique en font pleinement partie, bien qu’il n’y ait pas de consensus à date sur les critères permettant de définir, et donc d’évaluer, l’expérience patient. On peut néanmoins souligner l’existence d’un rapport réalisé par la HAS en 2011 sur le sujet, ainsi que la contribution à l’échelle internationale d’acteurs tels que ICHOM (International Consortium for Health Outcomes Measurements) dans la prise en compte de paramètres de qualité de vie dans les résultats de santé.

Il est indéniable que le concept d’expérience patient est dans l’air du temps. Nous voyons bien que notre avis de consommateur (ou d’usager) compte de plus en plus. Mais c’est aussi qu’il fait résonnance avec une aspiration sociétale profonde, y compris chez les professionnels de santé, qui y trouvent une véritable continuité dans le sens donné à leur travail. ».

Amah KOUEVI (Fondateur de l’Institut de l’Expérience Patient)

Dans ce contexte, quels sont le statut et le rôle de l’Institut Français de l’Expérience Patient  ?

Amah Kouevi :

« L’Institut Français de l’Expérience Patient (IFEP) est un organisme à but non lucratif créé en 2016 dans le prolongement d’initiatives similaires menées dans d’autres pays. Son champ d’action couvre principalement :

  1. Une mission générale de promotion et de pédagogie auprès des professionnels de santé, des institutions et des citoyens.
  2. La mise en pratique des connaissances, concrétisée par des actions de formation et d’accompagnement des professionnels désireux de mettre en œuvre des actions d’amélioration de l’expérience patient. »

Quelle est la feuille de route de l’IFEP d’ici à 2020 ?

Amah Kouevi :

« Nous lançons la deuxième édition du Baromètre de l’expérience patient auprès des professionnels de santé. L’enquête, élaborée en collaboration avec l’Institut BVA, s’adresse à tous les professionnels exerçant en établissements de santé ou médico-sociaux de tous statuts et fonctions. L’enquête est ouverte du 3 octobre au 4 novembre 2019 et les professionnels souhaitant participer peuvent accéder au questionnaire via ce lien.

Nous sommes également heureux d’annoncer la réalisation du pendant de cette étude, avec la première édition du Baromètre de l’expérience patient auprès des patients, avec la participation de France-Assos-Santé. Les résultats du baromètre dans ses deux composantes (patient et professionnels de santé), seront restitués le 23 janvier 2020 au Ministère de la Santé. 

Par ailleurs, l’IFEP poursuit sa mission d’information et de formation.

 

Enfin, le développement de l’IFEP passe aussi par l’élargissement de son réseau. C’est un axe stratégique qui doit permettre non seulement de développer la notoriété de l’Institut, mais aussi et surtout de faire participer un plus grand nombre de personnes (patients, professionnels, institutions) à cette aventure du développement de l’amélioration de l’expérience patient en France. Pour ce faire, il sera bientôt possible de rejoindre notre association en tant que membre et de prendre une part active aux travaux que nous menons dans le cadre de la constitution de groupes de travail. »

Nous terminerons par un thème qui m’est cher et familier : celui de la santé numérique. On associe en effet à la e-santé un certain nombre de bénéfices pour le patient : accessibilité et praticité améliorées, médecine plus personnalisée, plus participative…

En quoi la digitalisation de la santé vient impacter l’expérience patient ?

Amah Kouevi : « Sur le moyen et long terme, il ne fait aucun doute que la santé numérique présente des opportunités dans le cadre de l’amélioration de l’expérience patient. Mais son développement doit aussi relever plusieurs défis pour créer la confiance, comme celui de garantir la protection des données. Certaines solutions innovantes bouleversent le parcours de santé et questionnent la distribution des rôles parmi les intervenants de santé. C’est pourquoi il convient de rester en veille sur l’évolution des pratiques et de se placer dans une dynamique prospective.

C’est ce que nous souhaitons faire en créant la journée annuelle de l’expérience patient dont la première édition est prévue le 25 juin 2020, et dont le thème portera notamment sur la façon dont le progrès vient impacter l’expérience patient. Nous avons choisi le terme générique de progrès de façon à le décliner sous plusieurs angles : technologique, numérique, organisationnel, mais aussi médical, afin d’associer l’ensemble des acteurs, au premier rang desquels le citoyen, à la réflexion. Outre les débats et les interventions, un espace de démonstration permettra de mettre en avant des expériences novatrices pour faire percevoir de façon concrète en quoi l’expérience d’une personne confrontée à un problème de santé pourrait être transformée. »

Conclusion

L’intérêt pour la mesure de l’expérience des patients dans leur parcours de soins de santé est croissant dans de nombreux pays. En témoigne la généralisation d’enquêtes d’opinion dédiées, ou plus largement d’enquêtes de satisfaction qui incluent déjà des items relatifs à l’expérience du patient.

En France, le mouvement en faveur de l’amélioration de l’expérience patient est en marche, et 2020 promet d’être une année charnière au vu de la multiplication des initiatives. La réalisation d’un baromètre annuel auprès des professionnels et sa réplication auprès des patients est une étape préalable et nécessaire à la prise de conscience. Les données issues de ce type d’enquêtes permettent en effet de stimuler la volonté d’amélioration de la qualité des soins au niveau des établissement de santé.

Mais comme dans tout processus de changement, l’intention ne se traduit pas toujours par une modification de l’attitude, ni encore moins du comportement. Comme l’ont montré Prochaska et Di Clemente dans leur cercle du changement bien connu des praticiens de santé, pour être durable le changement doit passer par une phase de passage à l’action, elle-même suivie d’une phase de consolidation.

Pour « transformer l’essai » de l’amélioration de l’expérience patient, il faut donc miser sur le combo gagnant savoir + faire : poursuivre les efforts menés en matière d’information et de formation, et les redoubler s’agissant d’expérimentations et d’applications pratiques et concrètes.

Nul doute que l’Institut Français de l’Expérience Patient y contribue, aux côtés de nombreux autres acteurs dont l’engagement est tout aussi essentiel à transformer durablement notre système de santé dans un sens plus favorable aux attentes des patients.


Pour aller plus loin

[1] Source : www.definitions-marketing.com

[2] Source : ibid.

[3] L’Institut Français de l’Expérience Patient (IFEP) organise lundi 14 octobre 2019, une matinée de réflexion au Palais du Luxembourg, sous le patronage dAlain MILON, président de la commission des affaires sociales du Sénat, avec la participation de Gérard RAYMOND, nouveau président de France-Assos-Santé et de Christian SAOUT, membre du Collège de la Haute Autorité de santé. Inscription et programme détaillé accessibles via ce lien

[4] Plus d’informations via ce lien

 

 

Nous remercions vivement  Joséphine ARRIGHI DE CASANOVA, spécialiste des chatbots auprès des acteurs de la santé, et titulaire en 2019 de l’Executive Master en Marketing et Communication à l’ESCP Europe et du prix de la meilleure thèse professionnelle pour ses travaux intitulés : « Le chatbot : outil de persuasion ? Le cas de la santé en France ».

Elle propose de partager son expertise pour nos fidèles lecteurs de www.managersante.com


Biographie de l’Auteure :
Professionnelle expérimentée en marketing et communication B2B et B2B2C, multilingue, Joséphine ARRIGHI DE CASANOVA se spécialise dans les secteurs de la (e-)santé et du bien-être en 2017 après une première partie de carrière menée au service de grands groupes en restauration et en sécurité alimentaire.
Sortie major du programme Executive Master en Marketing et Communication à l’ESCP Europe en 2019, elle obtient le prix de la meilleure thèse professionnelle pour ses travaux intitulés : « Le chatbot : outil de persuasion? Le cas de la santé en France ».
Rédactrice et intervenante sur ce sujet, et plus largement sur la santé numérique, Joséphine consolide actuellement sa formation par un Diplôme Universitaire en e-santé et médecine connectée à Paris Descartes.
Elle met son expérience de la transformation digitale et la gestion de projets innovants au service des entreprises du secteur de la santé et du bien-être, qu’elle accompagne en tant que consultante-formatrice.

 


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Joséphine ARRIGHI DE CASANOVA

Professionnelle expérimentée en marketing et communication B2B et B2B2C, multilingue, Joséphine ARRIGHI DE CASANOVA se spécialise dans les secteurs de la (e-)santé et du bien-être en 2017 après une première partie de carrière menée au service de grands groupes en restauration et en sécurité alimentaire. Sortie major du programme Executive Master en Marketing et Communication à l’ESCP Europe en 2019, elle obtient le prix de la meilleure thèse professionnelle pour ses travaux intitulés : "Le chatbot : outil de persuasion? Le cas de la santé en France". La même année, elle obtient le Diplôme Universitaire en e-santé et médecine connectée de la faculté Paris Descartes. Joséphine accompagne la transformation numérique de la santé de deux façons : 1. en contribuant à développer des outils numériques de santé éthiques et performants, et 2. en accompagnant le changement auprès des professionnels de santé et des principaux acteurs de l’écosystème par une approche pédagogique d’information et de formation.

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