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Existe-t-il un support neuronal de l’Intelligence Emotionnelle (IE) ? Réponse du Docteur Bernard ANSELEM

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Article publié par notre expert en Neurosciences pour managersante.com, le Docteur Bernard ANSELEM, auteur de plusieurs ouvrages dont, « Je rumine, tu rumines, nous ruminons » (aux Editions Eyrolles, 2017) et « Ces émotions qui nous dirigent » (aux éditions Alpen éditions, 2017)


N°13, Février 2019


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Les faits d’une expérience vécue par Phineas GAGE 

Un physique hollywoodien, un nom évoquant un héros de Jules Verne, une participation à la conquête de l’ouest, pourtant Phineas Gage se serait bien passé de cette célébrité encombrante !

En travaillant sur un chantier ferroviaire au XIXe siècle, une explosion accidentelle projette une barre à mine à travers la partie antérieure de son cerveau (région préfrontale). Ce jour-là sa vie bascule. Il reste conscient et survit par miracle, mais son comportement change radicalement : en apparence rien de touché, mémoire, élocution, raisonnement sont conservés.

En revanche le comportement s’est modifié : d’un naturel consciencieux, organisé, avisé et responsable, il se transforme en être impulsif, grossier, imprévoyant, indifférent aux autres et insensible aux conséquences de ses actes, inapte à suivre un projet. Il ne peut conserver son emploi. Selon son médecin traitant « l’équilibre entre ses facultés intellectuelles et ses propensions animales semble avoir été détruit ».

La fin de sa vie aventureuse, au Chili, semble montrer une légère amélioration (il aurait conservé son emploi de conducteur de diligence à Valparaiso) avant de décéder prématurément de complications épileptiques, 12 ans après son accident.

Cet exemple spectaculaire (et quelque peu controversé) rejoint complètement les observations actuelles de patients porteurs de lésions des régions antérieures du cerveau, ainsi que les expérimentations animales et les observations de sujets sains en imagerie cérébrale.

La région impliquée (la partie antérieure et interne des régions frontales) est en lien avec

  • la régulation émotionnelle (d’où l’impulsivité et l’absence de contrôle de M. Gage),
  • la planification (d’où l’imprévoyance,  et l’altération de ses décisions)
  • l’évaluation émotionnelle et l’interaction sociale (indifférence aux autres et à soi)

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Qu’elle interprétation peut-on établir sur le siège de l’IE ? 

L’histoire de M. Gage est importante, c’est la première  fois qu’un changement de comportement et de personnalité n’est pas relié à l’esprit et à l’âme, mais directement incarné dans la matière cérébrale.

Il s’agit d’un point de départ, aboutissant bien plus tard, à la prise de conscience du rôle majeur des émotions sur nos  prises de décision rationnelles, sur nos interactions avec les autres et sur notre contrôle de soi. Autrement dit ces observations démontrent le support neuronal de l’intelligence émotionnelle (IE).

Il existe des milliers de confirmations expérimentales de ces observations initiales[i]. Le sujet est complexe, en pleine progression, les variations personnelles sont importantes, mais les conclusions sont globalement concordantes : les régions impliquées dans la prise de décision complexe et la perception émotionnelle se recoupent largement !

 

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Quels enseignements peut-on établir sur l’influence de l’IE dans nos jugements et nos décisions ? 

Accepter la part émotionnelle :

Pas de possibilité d’échapper à l’influence émotionnelle sur nos jugements et décisions. Croire que l’on peut contrôler complètement une décision rationnelle, c’est ignorer le fonctionnement de notre cerveau.

Cela ne nous transforme pas en marionnette impuissante, mais doit nous éclairer avant toute décision importante : suis-je sous l’effet d’une émotion susceptible de modifier ou altérer mon jugement ? De quel type d’émotion s’agit-il ? Suis-je en état de suivre mes intuitions ou mes « raisonnements » ? Mes déductions logiques sont-elles biaisées par le poids des informations que je retiens et par celles que je décide d’ignorer ou de minimiser ?

À l’inverse, suis-je dans de bonnes dispositions pour ressentir et utiliser mes intuitions (qui sont le fruit de mon expérience). Une infinité de facteurs extérieurs (présents ou passés) peuvent influencer nos déductions apparemment logiques, les expérimentations regorgent de preuves dans ce domaine.

Les réseaux émotionnels sont enracinés au plus profond de notre cerveau, ils sont plus anciens que la mémoire ou le langage ce n’est pas un hasard s’ils sont au centre, tout s’est construit autour!

Introduire la notion d’intelligence émotionnelle :

Comprendre ce que nous ressentons, comprendre pourquoi nous agissons, percevoir les attentes d’autrui, ressentir une empathie consciente, gérer nos objectifs dans la durée, savoir nous lier aux autres et développer des liens authentiques tout en respectant nos besoins, utiliser au mieux nos états émotionnels en fonction de chaque situation.

Il existe de nombreux modèles théoriques d’IE, de par le monde des centaines d’équipes de recherche travaillent à son évaluation rigoureuse. Les plus connus sont les modèles d’intelligence multiple de Howard Gardner, les modèles d’IE de Daniel Goleman, ou ceux des pionniers Peter Salovey et John D. Mayer. La plupart des études s’accordent à retenir des effets majeurs :

l’influence positive de l’IE sur les liens sociaux, sur le bien-être perçu, la santé physique et mentale, les performances professionnelles et la réussite sociale.

L’IE est également liée à une meilleure résistance au stress, à de meilleures décisions en contexte d’incertitude, à une diminution des risques d’addictions, de conflits et de burn-out.

L’intelligence émotionnelle se cultive :

Certains sont spontanément habiles, mais la plupart d’entre nous auront avantage à apprendre (ou améliorer) quelques compétences simples. Savoir identifier ses émotions, comprendre leurs influences sur nos pensées, savoir les accepter, les réguler, savoir utiliser les émotions agréables et tenir à distances les plus désagréables, prendre soin des autres et repérer leurs émotions, tout cela s’apprend !! De nombreuses études le montrent[ii].

Ces compétences peuvent se cultiver seul, mais seront plus efficacement acquise avec l’aide d’une expertise professionnelle. En effet, des connaissances sont directement accessibles par des articles ou vidéos très didactiques et convaincants, mais il demeure un besoin de sélection des informations pléthoriques, d’évaluation, de synthèse, et de mise en perspective transversale, nécessitant une expérience approfondie.

 

Au final, les souffrances de Phineas Gage et des patients similaires nous font prendre conscience qu’il existe des moyens de se connecter à soi et aux autres, de tenir compte de nos ressentis en respectant les attentes de notre entourage, de progresser, de se dépasser tout en se sentant libre de nos choix et proche des autres.


Pour aller plus loin : 

[i] A Damasio : l’erreur de Descartes (O. Jacob)

 [ii] Quoidbach J., Mikolajczak, M., & Gross J. (2015). Positive interventions: An emotion regulation perspective. Psychological Bulletin, 141, 655-693


 2000px-Linkedin_icon.svg   fb_icon_325x325


Nous remercions vivement le Docteur Bernard ANSELEM, Médecin spécialiste en imagerie médicale, master de recherche en Neuropsychologie (Toulouse, Lyon, Grenoble), titulaire d’un Certificat de « science of happiness » (Berkeley) et Formateur professionnel pour médecins ou entreprise. Il est également Auteur de plusieurs ouvrages dont, « Je rumine, tu rumines, nous ruminons » (Editions Eyrolles, 2017) et « Ces émotions qui nous dirigent » (Alpen éditions) conférencier.
Membre du comité d’éthique de l’université de Savoie

Il propose de partager son expérience professionnelle en Neuropsychologie pour nos fidèles lecteurs de www.managersante.com


Biographie de l’Auteur :
Médecin spécialiste en imagerie médicale, master de recherche en neuropsychologie (Toulouse, Lyon, Grenoble), certificat de « science of happiness » (Berkeley) et formateur professionnel pour médecins ou entreprise. Auteur conférencier.
Membre du comité d’éthique de l’université de Savoie.
Thèmes de travail : émotions, motivation, anxiété, prise de décision et efficacité, IRM fonctionnelle. Il souhaite créer des ponts entre les avancées récentes des recherches sur le cerveau ou le bien-être, et les applications pratiques au quotidien, à l’intention des personnes ne disposant pas de temps pour aborder les ouvrages théoriques ou académiques.

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Docteur Bernard ANSELEM

Médecin spécialiste en imagerie médicale. Auteur de 2 ouvrages : "Je rumine tu rumines nous ruminons" (2017 Eyrolles). & " Ces émotions qui nous dirigent" (2016 Alpen). Membre comité d'éthique Recherche de l'Université de Savoie (UFR LLSH). Master de recherche en Neuropsychologie (Toulouse, Lyon, Grenoble) Juin 2014. Certificate of achievement "Science of happiness, University of California, Berkeley " 2014. Conférencier. Conseil en Neuropsychologies appliquées. Formateur professionnel pour Médecins & Entreprises.

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